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Adam Smith : Fiscalité : les bons principes

Considéré par ses pairs comme le père de l’économie politique, Adam Smith jette les bases du libéralisme économique avec son œuvre principale, « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations », publiée en 1776. Professeur de philosophie morale, il a toujours teinté de morale les fondements de l’économie de marché. Le moteur de ses réflexions fut son indignation face à l’extrême pauvreté en Europe. Et c’est pour réduire cette pauvreté qu’il a préconisé le commerce libre, la division du travail, la propriété privée, le droit d’entreprendre et, il ne faut pas l’oublier, la réglementation du marché par l’État.

 

Catherine Lubochinsky, membre du Cercle des économistes, revient sur les écrits de celui que beaucoup considère comme le « père de l’économie »

Considéré comme le texte fondateur de la pensée économique classique, abordant de manière systématique l’ensemble des questions relatives à l’économie publique, cette œuvre d’Adam Smith, défenseur de la pensée libérale, comporte néanmoins deux parties sur l’impôt et les dépenses publiques. La discussion sur les impôts est précédée par les quatre maximes ci-dessus, maximes que les gouvernements, face à la crise actuelle des dettes publiques, devraient s’inspirer dans le cadre d’une refonte générale de la fiscalité en respectant le principe d’équité.

La première maxime insiste pour que tous les types de revenus soient être imposés. Tout agent économique (ménage ou entreprise) bénéficiant des dépenses de l’Etat (d’infrastructure, de justice, d’éducation etc.) doit y contribuer quelque soit la forme de revenu qu’il perçoit. Cependant, ce principe n’est pas vraiment respecté du fait des centaines « niches » et exemptions fiscales existantes. Si à l’époque de l’essor des marchés financiers il était judicieux d’utiliser la carotte fiscale pour encourager les placements financiers des ménages, de tels avantages fiscaux n’ont plus lieu d’être. Les baisses importantes des taux d’imposition des profits ont fortement baissé au cours des vingt dernières années (voir IMF Staff Position Note 10/13 septembre 2010), les pays s’étant livrés à une concurrence fiscale similaire à la stratégie de  dévaluation compétitive des années quatre-vingt et dont on connait l’inefficacité… La Commission Européenne vient d’émettre l’idée de taxer les transactions financières afin d’alimenter le budget européen, ce qui est en totale contradiction avec cette « maxime » … et révèle un manque de vision globale quant au financement de son budget.

Le message de la deuxième maxime porte sur la stabilité fiscale. Cette dernière est indispensable pour que les agents économiques puissent avoir des stratégies de moyen ou long terme. Or non seulement le code des impôts actuel, avec ces quelques trois cents taxes et autant de niches, fait le bonheur des avocats fiscalistes, comptables et autres professions s’y afférant, mais par contre les modifications annuelles incessantes, et globalement marginales, voire certaines modifications avec effet rétro actif,  engendrent une incertitude « qui autorise l’insolence » !

La troisième maxime correspond simplement à la TVA, impôt  équitable par principe, qui manque certes de progressivité mais cet aspect relève de la dimension politique. C’est sans doute son efficacité qui a conduit les pays du G7 à l’augmenter en moyenne  de 2,2 points de 1965 à 2007 alors que l’impôt sur les sociétés n’augmentait que de 0,2 points… (IMF op cit).

Enfin, la quatrième maxime fait référence au principe d’efficacité dans la collecte de l’impôt. Sur ce point il existe encore des marges de manœuvre telles, par exemple le prélèvement à la source.

Alors que l’insoutenabilité des déficits budgétaires des pays occidentaux est l’une des préoccupations majeures des Etats, dont la France, il est regrettable que les gouvernements successifs n’aient eu le courage de mettre en place une véritable réforme fiscale…en respectant des principes connus depuis plus de deux siècles !

 

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