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Le capital, c’est ce qui permet le développement de l’économie

Comprendre la réforme fiscale. Alors que le projet de loi de Finances 2018 prévoit un allègement la fiscalité du capital, de nombreuses voix s’élèvent, chez les politiques et dans l’opinion, pour dénoncer les ‘’cadeaux’’ faits aux plus fortunés. Pour Christian Saint-Etienne, il y a une confusion complète chez les Français, gauche et droite confondues. Confusion entre ce qui est le capital et ce qu’est le patrimoine des personnes. « Le capital, c’est ce qui permet le développement de l’économie. Une fonction de production, c’est du capital et du travail. Si on n’investit pas en capital, il n’y a pas de travail », affirme l’économiste. « En France, on crève de la désindustrialisation. L’industrie représente aujourd’hui 12% du PIB. On a eu tout un discours sur le fait que l’industrie représentait le passé, mais nous n’avons pas compris que nous sommes entrés dans la troisième révolution industrielle », ajoute Christian Saint-Etienne

Erreur d’analyse. « Dans les années 90, il y a eu tout un discours (à droite comme à gauche) sur l’entrée dans un monde post-industriel et post-travail. C’était radicalement faux », peste Christian Saint-Etienne. L’économiste d’ajouter : « Tous les pays qui fonctionnent bien, comme l’Allemagne, favorisent le capital et le travail. La troisième révolution industrielle, c’est la robotique, l’intelligence artificielle, ce sont des investissements gigantesques. Si on ne favorise pas le capital, ces investissements ne se feront pas en France mais ailleurs. Le travail du politique c’est de montrer la connexion entre ce qu’il faut faire et l’intérêt des français ». Taxer de manière égale le capital et le travail peut apparaître un principe philosophique. Mais, en application, quelle est la différence ? « Le travail est un flux, le capital est un stock, explique Christian Saint-Etienne. Donc si on veut taxer de manière équivalente le capital et le travail, il faut intégrer l’amortissement du capital dans la taxation de ce dernier. C’est ce qu’ont fait les suédois ». Et cela fonctionne.

La variable euro. Le taux de conversion qui arrange les allemands est un dollar quarante pour un euro. Selon Christian Saint-Etienne, « Au-dessus d’un euro vingt, les français et les italiens sont en difficulté ». Cela dure depuis une dizaine d’années. Pourquoi ? « Parce que les allemands ont beaucoup investi en capital productif, sont très en avance sur la robotisation de leurs usines par rapport aux italiens et aux français. Les français étant les plus en retard dans la robotisation et l’entrée dans la troisième révolution industrielle, les espagnols sont en train de passer devant », regrette le Professeur d’économie au CNAM. « Si les français retiennent uniquement l’idée selon laquelle la fiscalité du capital la plus basse est la meilleure pour les smicards, nous aurons fait un progrès colossal », reconnaît Christian Saint-Etienne. Mais « La raison joue aujourd’hui un rôle beaucoup moins important dans la réflexion collective que l’émotion. Le point relatif entre émotion et raison a changé depuis une trentaine d’années ». Dont acte.

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