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Climat : pourquoi un prix élevé du carbone est indispensable ?

1172799_la-course-au-juste-prix-sur-les-emissions-de-carbone-web-tete-021457493599_660x438pLa conférence Paris climat (COP21) s’est ouverte cette semaine. L’ébullition médiatique autour de cette conférence constitue déjà un succès dans la mesure où elle accélère la prise de conscience de la gravité du problème du réchauffement climatique par les citoyens du monde. Les vingt pays les plus vulnérables ont créé un groupe qui amplifie leurs alarmes : il faut agir vite et fort.

La conférence ne va pas toutefois inverser les évolutions en cours, mais elle constitue une étape dans la régulation de l’économie mondiale et ouvre des chantiers sur lesquels nous devrons travailler en commun : le prix à donner au carbone, les autres questions urgentes auxquelles nous sommes confrontés (air, eau, sols, migrations, biodiversité).

Le réchauffement va être freiné mais la tendance n’est pas inversée. La conférence de Paris s’inscrit dans un processus onusien ; elle a pour objectif de réunir les intentions de réduction des émissions de gaz à effet de serre exprimées volontairement par les nations. Aucune contrainte n’est imposée, mais on peut espérer que le volume des émissions, pour chaque pays, sera mesuré avec précision et qu’une révision à la hausse des objectifs sera demandée périodiquement (tous les cinq ans ?). L’addition de ces engagements, même en considérant qu’ils sont sincères, ne limitera pas la progression de la température au-dessous des 2 degrés, comme le souhaiterait la communauté scientifique internationale. C’est plutôt vers un réchauffement de 3 à 4 degrés que l’on se dirige d’ici à la fin du siècle. Pour inverser la tendance, il faudrait un prix élevé du carbone, mais aussi une accélération de la prise de conscience des citoyens pour qu’ils poussent leurs gouvernements à agir plus vite et plus fort.

Oui, il faut aller vers un prix élevé pour le carbone. La question du prix du carbone n’est pas sur l’agenda de la conférence car aucune contrainte ne peut être imposée. Il existe un quasi-consensus parmi les économistes pour dire que seul un prix élevé du carbone peut rompre l’asymétrie entre les énergies fossiles qui ne paient que très partiellement les coûts qu’elles engendrent et des énergies renouvelables. Deux modalités sont possibles : des taxes carbone ou des marchés de permis d’émission du type de celui établi en Europe, qui, d’ailleurs, appelle des corrections. Une quarantaine de pays ou de territoires ont déjà mis en place de tels systèmes. La Banque mondiale et le FMI encouragent ces initiatives. On peut penser que les systèmes seront peu à peu interconnectés et feront émerger un prix mondial du carbone. Encore faudrait-il qu’il soit suffisamment élevé pour activer la transformation des systèmes énergétiques.

L’air, l’eau, les sols, les migrations sont aussi des questions urgentes. Notre planète va accueillir 2 milliards d’individus supplémentaires d’ici à 2050. Cet accroissement de la population va aggraver la vulnérabilité de certains pays au réchauffement climatique. Les besoins de ces nouveaux arrivants mettent en évidence les multiples interdépendances et contradictions qui existent entre le réchauffement climatique, l’agriculture, l’eau et l’énergie. Des pays vont être contraints de s’adapter aux effets du réchauffement et cela pose le problème de l’aide financière et technologique à apporter aux pays les plus vulnérables. C’est l’engagement sur les 100 milliards de dollars par an à dégager d’ici à 2020, engagement dont les modalités d’allocation sont loin d’être claires. Ainsi, une régulation visant à maintenir la soutenabilité de la planète va bien au-delà de la COP21. De nouveaux chantiers doivent être ouverts ou approfondis sur les questions de qualité de l’air, de pollution des eaux douces et marines, de dégradation des sols, de migrations climatiques et de biodiversité. Ces problèmes doivent être attaqués simultanément à plusieurs niveaux : conférences onusiennes et organismes internationaux, régions, nations. Les collectivités locales, les ONG et les entreprises ont aussi un rôle majeur à jouer, comme le souligne la conférence de Paris.

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