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Brexit or not Brexit : quelle réaction des marchés ?

2ea958960f5368c5645308563de8d0a1-627x374Jeudi 23 juin, le Royaume-Uni dira s’il veut ou non sortir de l’Europe. A quelques jours du référendum, le camp du non à une sortie a repris des couleurs mais la tension est palpable. Jean-Paul Betbèze analyse les réactions possibles des marchés financiers qui aiment tout, sauf l’incertitude.

C’est la question ou, plus exactement, ce sont les trois questions que vont se poser les marchés financiers : « d’où vient donc ce référendum », « qu’est-ce qu’il traduit ou trahit » et « quels seront ses effets – indépendamment du résultat ? ».

« D’où vient donc ce référendum ? » : d’une inquiétude sur le futur. Les marchés financiers ne le comprennent pas bien, car ils voient les avantages de l’Union (et de la City) dans un monde en globalisation et en concertation, autour des quelques grandes régions. Et pourtant, la source de cette inquiétude, c’est que l’Union européenne s’est faite par empilements et élargissements successifs, depuis cinquante ans, au point d’en oublier sa base et de perdre sa dynamique.

Sa base est politique au sens large : « jamais plus la guerre en Europe ». Avec le temps, plus de pays sont venus, suite à l’effondrement de l’URSS, avec plus de compétences, jusqu’à l’euro pour certains. L’Union européenne est devenue plus complexe et la zone euro la deuxième économie du monde, mais toujours incomplète, avec l’euro, seule monnaie au monde sans Etat de rattachement. Pour avancer, l’Union a fondé sa crédibilité sur son rapprochement : celui d’une « ever closer union » et l’euro sur l’engagement qu’on n’en sortait pas : « l’euro est irréversible ».

Derrière, il y avait l’idée d’une Europe fédérale, avec monnaie unique. Mais la crise actuelle met à mal cette dynamique et fait naître un risque Europe et un risque euro. Le Brexit, c’est la question de l’évolution de l’ensemble et de ses liens internes : une Europe à la carte ? Les marchés financiers n’aiment pas : c’est compliqué !

« Qu’est-ce que traduit ou trahit ce Référendum ? » : des inquiétudes et des émotions, jusqu’au meurtre. Pensons aux réactions anti-migrants, aux tiraillements entre pays, régions, secteurs et entreprises, avec l’importance et la persistance du chômage, et à la difficulté des réformes à faire.

« Quels seront ses effets – indépendamment du résultat ? » : le Royaume-Uni a porté un coup de canif au contrat de l’Union, largement implicite il faut le reconnaître. Les choix européens devront être plus clairs et plus lisibles pour tous. Ça, les marchés vont aimer. En attendant, la livre va payer le prix, en étant moins utilisée, la City et ses banques aussi, les organismes financiers répartissant plus leurs sièges. La croissance mondiale va être ralentie, les hausses de taux différées, aux Etats-Unis d’abord, les IPO, OPA et OPE reportées. Ensuite, une accélération pourra se produire, en guise de rattrapage, pour profiter des moindres valorisations boursières que les marchés auront signalées : actifs anglais, actifs bancaires relativement « trop » présents à Londres…

Mais les marchés financiers vont aussi demander à la Pologne et aux pays scandinaves où ils vont aller : en zone euro ou out. Et ils finiront bien par poser la question d’un rapprochement plus fort entre Allemagne et France, ce qui impliquera que la France fasse des réformes au-delà de celles des… taxis ou de la loi El Khomri. Brexit ou pas Brexit : nous devrons tous bouger, plus vite.

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