" Osons un débat éclairé "

La croissance accélère en France, la bourse va-t-elle suivre ?

1e711c8b7dd5e1f6abc69bd0ba6194fb-627x356En jugeant dimanche 8 mai « probable » une révision à la hausse des prévisions de croissance de Bruxelles pour la France, le commissaire européen Pierre Moscovici s’est montré plutôt optimiste. Jean-Paul Betbèze explique pourquoi la bourse devrait suivre, et à quelles conditions.

A priori oui : il est temps de « rattraper » ! Depuis 2008, la bourse américaine a gagné plus de 50 %, comme l’allemande, la bourse française a perdu 10 %. On comprend donc pourquoi les investisseurs étrangers vendent en 2015 la bourse française et achètent des bons du trésor français, même s’ils rapportent peu. On comprend aussi pourquoi les français épargnent plus, mais en compte bancaire. Les dépôts à vue ont augmenté de 13 % sur un an.

Mais pour « rattraper », il faut que les profits montent. Plus précisément même, il faut savoir comment les investisseurs vont imaginer leur évolution. Si la majorité pense que les profits vont encore monter – parce que le ralentissement fait serrer les dépenses (investissements, salaires, frais généraux et frais financiers) –, alors la bourse repart. Les investisseurs achètent ces titres «  bradés » ou « massacrés », avant que la reprise ne se manifeste. Quelques années après, quand elle sera installée, ils se diront que les profits ne vont plus monter, en tout cas plus autant. Ils vendent. Moralité : la bourse monte plus tôt et baisse plus tôt que l’activité.

Mais c’était peut-être « avant ». Regardons les Etats-Unis. La bourse va-t-elle y faiblir, entraînant les autres, dont la nôtre ? C’est la question : la bourse américaine est au plus haut, continue d’avancer, mais inquiète. Les investisseurs savent que sa hausse vient largement de la Banque Centrale américaine. Si la Fed n’avait pas, vite, baissé ses taux courts à 0 %, puis acheté des bons d’Etat pour faire baisser les taux longs, les valeurs des banques et des compagnies d’assurance, puis de l’immobilier, puis des sociétés cotées ne seraient pas où elles sont. La politique monétaire du quantitative easing a été très boursière.

Et aujourd’hui, les Etats-Unis continuent de croître, mais plus lentement. Les pressions montent pour que les taux d’intérêts y augmentent. Les taux longs sont repartis à la hausse. Surtout, cette reprise économique est très particulière : l’une des plus longues d’après-guerre, c’est aussi une des plus modestes. Une des plus fragiles ?

Le cycle des affaires est peut-être en train de changer. La reprise est plus longue, et plus modérée. La question est de savoir si les profits continueront à croître, autrement dit si les salaires évolueront lentement, avec ce nouveau « plein emploi » qui vient des services de proximité. Pour l’heure, c’est le message qui vient des Etats-Unis et d’Allemagne. Avec des politiques monétaires très longtemps accommodantes, le cycle boursier pourrait accompagner plus longtemps ce nouveau cycle des affaires.

Ceci conduit en France à une double exigence : comprendre cette économie d’après crise, avec (peut-être) son nouveau cycle, en profiter surtout pour avoir des politiques fiscales (baisses de l’IS) et sociales (flexibilité) favorables à la profitabilité des entreprises, donc à la leur valorisation. Il n’est pas trop tard.

 

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