" Osons un débat éclairé "

Pourquoi les dépenses locales risquent de moins baisser

Le « pacte girondin » proposé par Emmanuel Macron aux élus locaux pour les années à venir ne sera certainement pas suffisant pour produire les fruits escomptés.

L’un des objectifs les plus ambitieux du présent gouvernement est la  réduction de la part des dépenses publiques dans le PIB . Leur croissance en volume doit être nécessairement plus faible que la prévision de 2% de croissance du PIB. D’où une action vigoureuse qui doit concerner les dépenses de l’Etat, les dépenses sociales et les dépenses des collectivités.

Sur ces trois fronts, les obstacles sont nombreux mais de nature différente. Pour l’Etat, des pans entiers de son fonctionnement sont considérés comme prioritaires, comme la défense, la police et la justice, l’enseignement et la recherche, et l’effort pour l’instant ne porte que sur des ministères peu dépensiers.

Une bataille essentielle se joue sur les dépenses sociales, mais, là encore, une simple stabilisation des dépenses des branches chômage, vieillesse et santé se heurtera à un formidable obstacle politique : ne pas indisposer l’électeur potentiel de la classe moyenne.

Restent les collectivités locales où, a priori, cet obstacle politique est absent, puisque LREM n’en gère pratiquement aucune ! En revanche, l’Etat n’a pas la main sur ces dépenses, en vertu du principe de libre administration inscrite dans la Constitution.

Le résultat est là

Le précédent gouvernement a usé d’une politique qui a été efficace pour freiner les dépenses locales. La diminution du montant des subventions a été massive, 7 milliards d’euros, à travers des coupes claires dans la dotation générale de fonctionnement.

Le résultat est là, sur les trois années 2014, 2015 et 2016, les dépenses de fonctionnement ont été stabilisées (1% de croissance au total), les prestations et autres dépenses de transfert sont restées stables en euros courants et les dépenses d’investissement ont baissé de 6 milliards d’euros, si bien qu’au total les dépenses des collectivités locales ont baissé de 5 milliards d’euros ! Chaque collectivité locale est restée libre de ses choix, soit réduire les dépenses, soit augmenter les impôts.

Tenir compte des diversités

Le présent gouvernement a décidé de changer de méthode et de proposer  un pacte « girondin » , une terminologie trompeuse, car il s’agit de passer un licol aux 319 plus grandes collectivités locales en termes d’augmentation annuelle maximale des dépenses de fonctionnement. Le point d’arrivée n’est pas encore connu, mais le seuil, d’abord fixé à 1,2 %, a été revu à la hausse, à 1,9 %, inflation comprise. Ne pas raisonner hors inflation semble curieux, puisque l’inflation de l’ordre de 1 % cette année peut revenir à 2 % d’ici à deux à trois ans, en vertu du mandat de la BCE.

Il faudra tenir compte des diversités des territoires, en termes d’efforts de gestion déjà réalisés, de difficultés en termes d’emploi et des divergences démographiques. L’aire urbaine de Nice a une population étale, alors que celles de Bordeaux, Nantes, Toulouse, Rennes et Montpellier progressent à un rythme de 1,4 % par an. Il serait absurde de les traiter de la même façon. Bref, un joli casse-tête en perspective pour Bercy et les services du ministère de l’Intérieur.

Des vertus discutables 

Pour tout dire, les vertus du nouveau dispositif semblent discutables par rapport à la méthode précédente. D’une part, l’Etat doit en rester à des objectifs macroéconomiques, aboutir à une baisse en moyenne de la dépense publique. Que cela soit obtenu par une baisse à Dunkerque et une hausse à Perpignan ou l’inverse n’est pas de son ressort. Selon les principes girondins, le dernier mot appartient à l’électeur. Seule une pensée jacobine peut nourrir l’idée que c’est à Bercy d’en juger.

D’autre part, en termes de réduction des dépenses publiques, les objectifs annoncés sont en retrait par rapport aux acquis du quinquennat précédent. De plus, la nouvelle politique ne générera pas d’économies pour l’Etat, car celui-ci s’est engagé dès lors à maintenir l’enveloppe des concours aux collectivités. A moins de compter sur les recettes procurées par les pénalités appliquées en cas de dépassement de la norme.

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