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Quel financement pour les PME en Afrique ?

4324779c13b6ad97f4951132c500aad0-627x360Le Cercle des économistes vient d’organiser les premières Rencontres Economiques de Dakar, au Sénégal. Pendant deux jours, les intervenants ont planché sur les leviers de croissance pour l’Afrique subsaharienne. Selon Christian de Boissieu, il est urgent d’avancer sur la question du financement des entreprises locales.

 

En Afrique comme en Europe, l’activité et l’emploi sont étroitement et positivement indexés sur la santé des PME et ETI. C’est pourquoi la lutte contre le chômage en général, contre le chômage des jeunes en particulier, passe par un financement adéquat de ces entreprises.

Dans le nouveau contexte réglementaire, les banques vont devenir plus sélectives dans l’octroi  des crédits. Une nouvelle phase de désintermédiation s’ouvre au plan mondial, et l’Afrique ne sera pas à l’écart de ce mouvement, même si la plupart de ses marchés financiers y demeurent aujourd’hui dans une situation d’émergence, et même pour certains d’entre eux de non-émergence caractérisée…

Il est malgré tout plus que légitime d’avoir, à l’horizon des dix prochaines années, des ambitions pour l’essor des bourses en Afrique. Aujourd’hui, il faut saluer le rôle de places financières comme Johannesburg ou Nairobi, les ambitions de  Casablanca Finance City (CFC),  la relance de la bourse à vocation régionale d’Abidjan après les évènements que l’on sait, etc… La désintermédiation va forcément gagner du terrain en Afrique, mais les financements  bancaires vont rester prédominants  encore longtemps.

Partout, donc aussi en Afrique, se pose le problème de l’articulation entre les banques et la finance parallèle (« shadow banking »). Cette finance parallèle s’y est développée depuis longtemps, alimentée en grande partie par le secteur informel. Son existence et sa pérennité montrent qu’elle répond à certains  besoins de financement pour les emprunteurs et de placement pour les épargnants. En même temps, la finance parallèle pose partout des  défis. Car elle est susceptible de concentrer trop de risques  et donc d’être un « nid » à  crises systémiques.

En Afrique, il va falloir mobiliser toute une palette de nouveaux financements. Consolider l’émergence de marchés financiers va aider, mais cela n’y suffira pas : même sur les marchés les plus développés, les PME hésitent à venir, pour des tas de raisons, et les investisseurs répugnent  également à s’engager… En pratique, il faut dépasser le clivage banques/marchés et distinguer trois canaux de financement de l’économie réelle : les financements bancaires, les financements de marché et les financements via des fonds.

L’Afrique va devoir  compter aussi sur des financements par des fonds pour réaliser  sa croissance qui, heureusement, va rester vive. L’essor du « private equity », à condition de favoriser par la politique fiscale les stades amont que sont le capital-risque et le capital-développement, fait partie  des priorités de la politique financière des pays africains. Il faut combiner cet axe avec toutes les autres directions susceptibles d’encourager  le financement de l’économie réelle : la finance participative (« crowdfunding »), la micro-finance, la finance islamique…

Il s’agit là de canaux à soumettre, comme les autres, à des réglementations prudentielles, et impliquant souvent,  directement ou indirectement, les banques. Le clivage intermédiation/désintermédiation  doit donc  forcément être relativisé !

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