" Osons un débat éclairé "

La démographie, tabou des écologistes

Elle est loin l’image de l’écologiste parti dans le Larzac pour vivre en accord avec ses convictions. Notre militant est revenu au coeur des centres-villes et ses préoccupations occupent désormais tout l’espace public.

Face aux dynamiques climatiques et environnementales – officiellement qualifiées d’urgences -, il porte le changement des comportements de tous, par des normes, des taxes et même une éducation à ce qu’il faut penser. Et malheur aux rétifs, leur égoïsme sera publiquement dénoncé.

Selon l’ONU, il y a 80 % de chances que la population mondiale augmente de 25 % d’ici à 2050. Un sujet majeur, qui laisse de marbre les écologistes.

On entend les écologistes sur tout, sauf sur une question : la natalité. C’est un peu étonnant car selon l’Organisation des Nations unies, il y a 80 % de chances que la population mondiale se situe entre 9,5 et 10 milliards d’habitants en 2050. Mine de rien, cela représente une augmentation d’environ 25 %. Et encore, les projections ne prennent pas en compte la nouvelle orientation nataliste du gouvernement chinois, qui veillera à ce que sa politique soit plus « inclusive », ce qui doit se comprendre comme plus suivie.

Etant donné l’augmentation anticipée de la population mondiale, si l’on veut que les émissions de gaz à effet de serre soient stabilisées, il faudrait donc que les émissions par tête soient réduites de 20 %, ce qui est colossal. Mais face à cet enjeu majeur, que ce soit à la Convention citoyenne pour le climat, au Haut Conseil pour le climat, à Europe Ecologie-Les Verts ou ailleurs, le silence est assourdissant.

Une pauvre opposition

Il est vrai que ce n’est pas facile de parler de réduction des naissances. Parce que cela touche à l’intime et parce que des institutions puissantes en ont fait leur chasse gardée. Les Eglises, bien sûr, mais également les gouvernements et même les défenseurs autoproclamés du peuple.

On se rappelle de Proudhon déclarant que « s’il y a un homme de trop sur terre, c’est bien M. Malthus ». C’est d’ailleurs l’interprétation grivoise des travaux de ce dernier qui ont valu durablement à la science économique le surnom de « science triste ». Aujourd’hui, c’est le spectre de « l’hiver démographique » que l’on promet à quiconque ne déplore pas la baisse de la natalité.

Le débat environnemental ignore donc la question cruciale et se focalise sur une pauvre opposition entre ceux qui pensent que le progrès technologique nous sauvera et ceux qui pensent le contraire. Et, finalement, le consensus se fait sur la nécessité de créer des « emplois verts » et d’engager une relance en faveur de la transition écologique.

Lors de la campagne de 2007, Ségolène Royal assurait déjà qu’une politique de lutte contre le réchauffement climatique permettrait de créer des emplois. La « royalisation » des esprits est aujourd’hui éclatante : des services de Bruno Le Maire à ceux d’Ursula von der Leyen, tous ont adopté le même mantra.

C’est justement parce que la question de la réduction des naissances est difficile et conflictuelle, qu’elle doit être abordée par les candidats à la présidentielle. Il est facile d’anticiper que tous, la main sur le coeur, nous assureront de leur engagement en faveur de l’environnement. Mais qui osera discuter de la politique familiale française, qui est l’une des plus subventionnée au monde ?

Plutôt que s’occuper des sapins de Noël, du Tour de France ou autres détails, les élus écologistes feraient bien d’aborder les enjeux démographiques du changement climatique. Plutôt que disserter sur les rêves des enfants, ne faut-il pas réfléchir à leur nombre ? Un véritable engagement ne doit pas craindre les questions qui fâchent.

Hippolyte d’Albis

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