" Osons un débat éclairé "

Non, la baisse de notre natalité n’est pas alarmante

Il n’y a rien de surprenant dans la baisse de la natalité en France. Rien ne justifie, non plus, une réorientation de l’actuelle politique familiale.

Les commentateurs peuvent dès à présent se préparer : dans un an, lors de la présentation de son « Bilan démographique », l’Insee annoncera que les naissances en 2018 ont à nouveau baissé. Et ce pour les mêmes raisons qu’en 2017. Premièrement, la France connaît actuellement une baisse du nombre des femmes âgées de 27 à 34 ans, qui sont les plus susceptibles d’avoir des enfants.

Cette baisse du nombre de « mères potentielles » s’explique très mécaniquement par le fait que le nombre de naissances dans les années 1980 était, lui aussi, faible. Il a diminué jusqu’en 1994, où un point bas avait été atteint avec moins de 711.000 naissances en France métropolitaine. Du jamais-vu depuis 1946.

Pour le rebond des naissances, il faudra donc encore attendre quelques années : il arrivera lorsque les très nombreuses jeunes filles nées à la fin des années 1990 et au tournant du millénaire auront atteint les âges où l’on se décide habituellement à être mère.

Baisse mondiale de la fécondité

La seconde raison de la baisse des naissances tient aux choix de fécondité des couples. Depuis la génération née en 1926, qui a eu en moyenne 2,6 enfants par femme, on observe une diminution continue et cette baisse touche la quasi-totalité des pays du monde.

Mis à part dans les cas extrêmes de très faible fécondité, observés dans certains pays d’Europe de l’Est et du Sud ou d’Asie, ou à l’inverse de très forte fécondité, que l’on trouve en Afrique subsaharienne, il est difficile de juger du « bon » niveau de fécondité. Et pourtant, les avis sont souvent très tranchés.

L’argument nataliste repose habituellement sur une rhétorique qui brandit l’épouvantail d’une société vieille, avec en toile de fond une peur du déclin. A l’opposé, l’argument malthusien se concentre sur le bien-être des enfants et des mères et, plus récemment, sur la protection de l’environnement. En France, les natalistes l’ont clairement emporté au point qu’une annonce d’une baisse de 2,1 % du nombre des naissances est vécue par certains comme une tragédie nationale.

Aider les parents modestes

Depuis soixante-dix ans, l’Etat est sommé d’intervenir très activement dans le soutien à la natalité, ce qu’il fait en engageant des sommes colossales dans une politique familiale multiforme dont l’ensemble représente près de 5 % du PIB.

Cette politique a eu des effets indéniables sur la fécondité française mais elle a longtemps souffert d’une absence de hiérarchie entre ses instruments. Au cours du précédent quinquennat, une courageuse réorientation a été mise en place. Elle consiste d’une part en une réduction de l’universalité des allocations au profit d’allocations sous conditions de ressources et, d’autre part, en une réduction de l’avantage fiscal maximal engendré par le quotient familial.

Le principe de cette politique repose sur le fait avéré que, passé un certain niveau de revenu, les transferts monétaires n’ont pas d’effets sur les choix de fécondité des couples. En revanche, lorsqu’ils sont ciblés sur les plus pauvres, les transferts favorisent la fécondité et améliorent le bien-être des enfants. Ceci reste malheureusement un enjeu majeur car le taux de pauvreté des enfants reste dramatique en France, et atteint 40 % dans les familles monoparentales.

Soutenir les mères actives

En parallèle, l’accroissement de la capacité d’accueil des jeunes enfants a été continûment amélioré, augmentant ainsi de près d’un tiers entre 2004 et 2014. Le soutien public à la garde d’enfants, qui bénéficie à toutes les classes sociales, doit encore être accru car il permet aux mères de poursuivre une activité professionnelle.

La coexistence d’une fécondité élevée et d’une participation forte des femmes au marché du travail est nécessaire afin de relever les défis démographiques et économiques du vieillissement de la population. Il est donc important de maintenir les orientations actuelles de la politique familiale.

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