" Osons un débat éclairé "

Rémunérations : le fossé se creuse entre productivité et salaires

Patrick Artus

Patrick Artus

Débat récurrent. Même si la mesure a été rejetée par un « non » massif lors d’un referendum en Suisse dimanche 18 mai, l’instauration d’un salaire minimum de quelque 3.500,00 euros – tenant compte du niveau de vie élevé dans la Confédération helvétique – continue d’alimenter le débat sur le niveau du salaire minimum en Europe, et à fortiori en France. Récemment, le président du Medef, Pierre Gattaz, a insisté sur sa volonté d’étudier avec les syndicats et le gouvernement l’idée d’un Smic transitoire pour les chômeurs de longue durée et les jeunes sans formation. Selon Patrick ARTUS, « le débat est rendu compliqué car la France est seule dans son camp. Elle fait exception depuis 15 ans au sein de tous les grands pays de l’OCDE ».

Modération. La polémique a enflé lorsque le président du Medef a expliqué qu’il fallait faire attention à une modération sur les rémunérations fixes pour ne pas peser sur la compétitivité mais, au contraire, encourager le développement des parts variables liées aux performances des entreprises. Ainsi donc, « la France est le seul pays de l’Ocde à évoluer à rebours. Depuis 15 ans, les salaires augmentent plus vite que la productivité. Nous avons des relations du marché du travail extrêmement différentes de celles des autres pays de l’Organisation de coopération », explique Patrick ARTUS. Et l’économiste de préciser : « en ce moment en France, les salaires réels augmentent d’1% par an, ce qui est plus rapide que la productivité ».

Incompréhension de l’opinion. « Même à des niveaux très faibles d’augmentation des salaires réels, nous sommes déjà au-dessus de la productivité, ce qui fait baisser d’autant les marges des entreprises », souligne l’économiste. Mais il est difficile de faire comprendre aux salariés que leurs rémunérations doivent progresser moins vite pour ne pas pénaliser leur entreprise, et par là même le fonctionnement général de l’économie du pays. L’idée n’est pas, non plus, de pénaliser les salariés. Plus loin que le seul monde de l’entreprise, l’Etat a lui aussi un rôle à jouer pour améliorer le pouvoir d’achat des Français, notamment grâce à une politique fiscale adaptée.

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