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Jackson Hole 2017 : pas de laxisme pour la régulation financière

Les économistes et observateurs qui attendaient les interventions de Mario Draghi et Janet Yellen au dernier symposium international de Jackson Hole en sont pour leurs frais. Les deux banquiers centraux n’ont pas abordé les questions de politique monétaire, mais axé leurs propos sur la réglementation financière et l’ouverture internationale. Selon Catherine Lubochinsky, le contexte économique actuel impose plus que jamais une régulation financière digne de ce nom.

Une revue de presse sur le Symposium organisé par la Federal Reserve Bank de Kansas City les 24 et 25 août derniers à Jackson Hole permet de constater une certaine déception des « Fed Watchers », ou autres spécialistes des annonces de banquiers centraux : pas un mot permettant d’atténuer l’incertitude quant à l’évolution prochaine de la politique monétaire américaine et européenne.

Et pourtant, l’évolution de la parité Euro/USD (une appréciation de l’euro de plus de 15% depuis le début de l’année) n’est pas sans conséquences, même si le taux de change n’est pas un objectif de Banque Centrale, sur la rapidité ou le gradualisme prochain de la sortie de l’assouplissement quantitatif du crédit. Les anticipations des amateurs de petites phrases ont été vaines.

Cependant, les messages contenus dans les discours de Janet Yellen et Mario Draghi ont porté sur deux enjeux majeurs des économies, avancées et émergentes, avec une dimension politique à peine voilée : la régulation bancaire et financière et les échanges internationaux.

L’intervention de Janet Yellen fut un plaidoyer en faveur de la réglementation financière. Les progrès accomplis en termes de régulation depuis la dernière crise sont indéniables : plus de fonds propres pour les banques, plus de transparence, une supervision renforcée des établissements systémiques, des plans de rétablissement et résolution afin d’éviter le recours au contribuable et une moindre interconnexion grâce à la compensation centralisée des produits dérivés…

Les travaux du Comité de Bâle, mais aussi ceux de chercheurs académiques, en confirment les effets bénéfiques nets. Les coûts de ces réformes pour l’industrie financière sont loin d’être négligeables mais les profits récents des grands établissements ne le sont pas non plus.  Pour autant,  cette meilleure résilience du système financier ne saurait se traduire par un excès de confiance, de nombreux risques demeurent. Celui de la course au gigantisme des acteurs (banques, gérants d’actifs, etc.), renforcé par les fusions et acquisitions, semble passé sous silence, même à Jackson Hole. C’est oublier que la première dimension du risque systémique est bien due à l’existence d’institutions « too big to fail ».

L’intervention de Mario Draghi fut un double plaidoyer : en faveur de l’ouverture internationale, tant pour le commerce que pour les flux financiers, mais aussi en faveur de la régulation financière. Il a souligné que ce n’est jamais le bon moment d’assouplir la régulation, mais qu’à certains moments c’est particulièrement inopportun !

Se préoccuper de la réglementation américaine se justifie par l’impact des conséquences internationales sur les conditions financières domestiques. Selon le FMI (Global Financial Stability Report Avril 2017 Chap. 3), il y aurait ainsi une perte de contrôle de ces dernières avec une sensibilité accrue aux chocs globaux. Ceci pouvant réduire donc l’efficacité des canaux de transmission des politiques monétaires, plus particulièrement pour les pays émergents, maintenir une régulation financière forte et homogène n’en paraît que plus indispensable et prioritaire.

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