Développer une croissance inclusive et durable dans les pays de l’Union africaine. Le sujet paraît bien éloigné des préoccupations du moment en Europe, avec la guerre en Ukraine et les questions liées à l’inflation galopante, l’érosion du pouvoir d’achat… qui plus est, à l’aube d’un nouveau quinquennat en France.
Mais cela serait une grave erreur, une faute politique, d’oublier l’un pour se concentrer sur l’autre. Négliger l’Afrique dans la situation actuelle relève du déni de réalité. Les conséquences encore bien réelles de la pandémie s’ajoutent aux maux nombreux d’un continent surendetté et marqué par les crises de tous ordres. L’Afrique a besoin d’un financement pertinent.
Quelles opportunités s’offrent aujourd’hui à ce continent ? Comment les transformer en faveur des populations locales ? Comment développer l’investissement et à quel niveau la France peut apporter sa pierre à l’édifice ? Comment rendre la dette durable ? Des réponses existent. Les rédacteurs de cette note ouvrent des pistes concrètes, sans parti-pris.
« Face à de nouvelles réalités, nous voulons aller de l’avant en changeant les paradigmes » : en décembre 2019, Son Excellence Monsieur le Président de la République du Sénégal Macky Sall a clôturé ainsi la Conférence internationale de Dakar, organisée par la République du Sénégal et Le Cercle des économistes, en partenariat avec le Fonds Monétaire International (FMI), la Banque mondiale et l’Organisation des Nations unies (ONU). En présentant le Consensus de Dakar, un texte ambitieux qui détaille sept points de convergence pour trouver le juste équilibre entre développement durable et dette soutenable, les organisateurs ont fait le pari ambitieux de poser les bases des réponses collectives aux problématiques de soutenabilité de la dette africaine face au développement du continent, dans ses relations avec ses partenaires institutionnels, publics ou privés. Aujourd’hui, les impératifs de développement – en Afrique et dans le reste du monde – ont été structurellement remis en question par les bouleversements économiques, politiques et sociaux engendrés par les crises et la pandémie de la Covid-19.
Dans la continuité des objectifs et ambitions exprimés dans le Consensus de Dakar et dans le cadre de la Présidence sénégalaise de l’Union africaine (UA) en 2022, nous proposons face au nouvel environnement impacté par la crise et la pandémie, de nouvelles recommandations pour permettre à l’Afrique de consolider sa relance et son développement dans les conditions les plus
favorables. Ces propositions visent à réaliser trois objectifs majeurs : réduire la vulnérabilité des économies africaines face aux incertitudes auxquelles elles sont soumises, réajuster la perception du risque en Afrique pour attirer plus efficacement les investissements, enfin, de mieux cibler les stratégies de relance et développement pour permettre à ces investissements de trouver des débouchés dans une croissance inclusive et durable.
Ces objectifs ne seront réalisables qu’avec une coordination stratégique à l’échelle continentale. L’Union africaine, pour développer une croissance inclusive et durable, doit mettre en place des outils, opérationnels et mobilisables dès à présent.
Assurer la stabilité financière en Afrique
La vulnérabilité des économies africaines face aux incertitudes auxquelles elles sont soumises est un frein majeur au développement des investissements. Améliorer la résilience des économies du continent, c’est-à-dire leur capacité à résister aux chocs, est nécessaire pour rétablir la confiance des investisseurs et des politiques. La mise en place d’un Mécanisme Africain de Stabilité Financière (MASF) largement doté, notamment par les Droits de Tirage Spéciaux (DTS), est le levier essentiel pour y parvenir.
La mission essentielle du MASF sera d’assurer la stabilité financière en Afrique, ce qui implique de remplir trois objectifs précis. Le premier est de favoriser l’obtention de taux d’intérêts concessionnels lorsque les pays font face à un assèchement des financements du fait de taux d’intérêts trop élevés leur étant appliqués, car il est essentiel de pouvoir renverser à temps les dynamiques de crise. Le second objectif sera de soutenir les pays faisant face à des crises bancaires systémiques. Ce soutien peut se faire par une assistance vers les États concernés, ou directement en direction des acteurs des systèmes bancaires affectés. Enfin, le troisième objectif sera de soulager les tensions dans les pays victimes d’attaques spéculatives, afin de rétablir la confiance des investisseurs quant à la capacité des pays membres à résister à ce type d’attaques. Ces trois objectifs sont primordiaux et doivent constituer les fondations du MASF, tout en laissant une marge de manœuvre pour des adaptations régionales, du moins temporairement. Le MASF doit également pouvoir prendre en compte les mécanismes de remboursement des dettes des pays membres de l’Union africaine, avec des outils de rachat de titre à l’image du quantitative easing (assouplissement quantitatif).
Pour mettre en place ce MASF, il sera essentiel de mobiliser les liens économiques, commerciaux et sociétaux au niveau régional dans une démarche bottom-up agrégative. Cela permettra in fine d’ériger progressivement une structure stable et robuste à l’échelle du continent, qui se sera adaptée aux spécificités régionales le temps de transiter vers un mécanisme unifié. En conséquence, le MASF devra être développé d’abord à partir et en partenariat avec les organisations économiques régionales existantes comme par exemple la CAE (Communauté d’Afrique de l’Est), la CEDEAO (Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest), la CEEAC (Communauté économique des États de l’Afrique centrale), la CEMAC (Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale), la CEN-SAD (Communauté des États sahélo-sahariens), le COMESA (Marché commun de l’Afrique orientale et australe), l’UEMOA (Union économique et monétaire ouest-africaine) ou l’UMA (Union du Maghreb arabe).
Une fois l’agrégation et l’association de ces entités régionales, de leurs objectifs et de leurs cahiers des charges, il sera alors possible de les intégrer en une seule entité continentale à l’horizon 2030, le MASF.
Le MASF sera doté de 200 milliards d’euros dès 2022, financés pour un quart par les pays membres de l’Union africaine, et par une redistribution des DTS des pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) vers le continent. Pour garantir la stabilité financière du continent, le montant alloué à ce MASF sera estimé par rapport au poids économique du continent et des pays africains, et par rapport aux risques qui pèsent sur ces économies. Dans la Zone euro, les fonds du Mécanisme Européen de Stabilité représentait près de 7% du produit intérieur brut (PIB) de ses États membres lors de sa création. Ainsi, alors que le FMI estime le PIB des pays de l’Union africaine à près de 2 400 milliards d’euros courants en 2020, il conviendra de doter le MASF d’au moins 170 milliards d’euros, auxquels il sera nécessaire d’ajouter au moins 30 milliards d’euros pour compenser les risques qui pèsent sur les économies africaines, qui sont à la fois plus importants, plus divers et géographiquement plus diffus. Cela porterait la dotation initiale totale du MASF à 200 milliards d’euros. Ce financement ne doit pas provenir uniquement des pays de l’OCDE, afin que les pays membres de l’Union africaine puissent se l’approprier pleinement. Un financement local des pays de l’Union africaine à hauteur d’un quart des fonds semble donc raisonnable, soit 50 milliards d’euros, dont les 40 milliards d’euros d’allocation directe de DTS du FMI aux pays de l’Union africaine. Concernant le reste du financement, c’est- à-dire 150 milliards d’euros, il conviendra d’associer la redistribution de DTS des pays de l’OCDE aux pays africains conformément aux décisions prises à la suite du sommet du G20 de Rome en octobre 2021 et du Sommet de Paris sur le financement des économies africaines en mai 2021. Près de 120 milliards d’euros de DTS doteront ainsi le MASF. Les 30 milliards d’euros restant proviendront de la mobilisation de plusieurs autres entités, comme la Banque Africaine de Développement (BAfD), la Banque Européenne d’Investissement (BEI) et les bailleurs de fonds internationaux. Ces institutions pourront apporter des financements directement en fonds propres, ou indirectement, par des garanties publiques notamment. Dans la première étape du développement, le MASF sera présenté dans un modèle désagrégé et la répartition pourra se faire en fonction des PIB de chaque zone.
Réduire les coûts de financement des investissements
Le développement d’une agence de notation panafricaine est essentiel pour optimiser les signaux envoyés aux investisseurs en Afrique. Les principaux acteurs et critères de notations existants pénalisent l’Afrique, ce que met en évidence la classification des risques pays des membres de l’OCDE. La nouvelle agence de notation africaine devra être créée à l’initiative du CFUA – lequel est à la tête du conseil d’administration de l’agence de notation. Elle mobilisera des critères financiers et extra-financiers adaptés et différenciés tout en réunissant l’ensemble des principaux acteurs des marchés impliqués dans le secteur de la notation sur le continent. Pour une notation efficace, de nombreux critères doivent être pris en considération, comme la force et la stabilité de l’économie réelle, le climat des affaires, les capacités de remboursement de la dette des États et des entreprises, la qualité de la structure financière, la gouvernance et le système politique, le niveau d’intégration régionale ou encore l’impact social et climatique. L’ensemble de ces critères pèse actuellement sur la notation des pays africains diffusée par des institutions comme l‘OCDE. D’autres critères novateurs pourront être intégrés à la grille de notation de cette nouvelle agence de rating panafricaine, comme la diversité culturelle et ethnique des États, la force des écosystèmes locaux et la stabilité du secteur informel ou encore l’inclusion de la jeunesse et des femmes dans les sphères économique et sociale. Cette agence pourrait ainsi permettre de faire baisser naturellement les taux d’intérêt de l’ordre de deux points à horizon cinq ans.
La création d’un dispositif de rehaussement du crédit (ou monoline) pour le secteur privé africain doit accompagner les besoins en investissement du continent. Ce dispositif est un établissement financier qui apporte sa garantie à des émetteurs d’emprunts sur les marchés financiers et les entreprises de manière générale. Afin de baisser le coût du capital, il doit être porté par un établissement noté AAA, par exemple la BAfD, en coordination avec le CFUA. Dans ce type de dispositifs, il est d’usage de garantir 10% à 35% des prêts afin d’éviter de s’exposer de manière trop importante et de permettre à l’emprunteur d’obtenir des conditions de crédit favorables et moins coûteuses. La garantie serait apportée en première perte, c’est-à-dire sur les défauts de paiement dès qu’ils surviennent, ce qui permet d’inciter à un surcroit de crédit aux entreprises, notamment les petites et moyennes entreprises. En ce sens, 50 milliards d’euros mobilisés par ce dispositif de rehaussement du crédit permettraient de garantir 20% des 251 milliards d’euros des besoins en financement du continent d’ici 2025 selon le FMI, soit environ 11% du marché obligataire africain actuel, estimé à 463,3 milliards d’euros par l’indice des marchés financiers africain de l’ABSA (Absa Africa Financial Market Index). Ce dispositif sera directement lié à la BAfD, au CFUA, et réunira également les bailleurs internationaux institutionnels et privés. Un tel dispositif aurait alors pour incidence de faire baisser les taux d’intérêt de l’ordre de deux points supplémentaires.
Enfin, il faut faire émerger un réseau de places financières internationales en Afrique, à la fois par le co-listing des grandes entreprises africaines dans les marchés développés et sur les nouveaux hubs financiers, et par un développement mieux séquencé. Le co-listing des grandes entreprises africaines permettra de limiter la dépendance des entreprises continentales aux marchés des pays développés, et octroiera une plus grande liquidité et valorisation de ces nouvelles places internationales africaines. Ce développement permettra naturellement d’approfondir les marchés pour permettre la cotation des entreprises de taille intermédiaire, voire des petites et moyennes entreprises, afin de faciliter leur accès au financement et augmenter la valorisation de ces marchés financiers. Pour leur donner forme, ces nouvelles places devront se développer en plusieurs étapes. D’abord, établir la présence préalable d’institutions de régulation et de place, ainsi que des contreparties dont les investisseurs institutionnels. Ensuite, développer un marché obligataire public, un marché privé, un marché des actions et un marché au comptant de matières premières. Enfin, mettre en place, à long terme, un marché des dérivés. L’objectif est d’établir un cadre législatif et opérationnel pour permettre aux places de ce réseau des rapprochements qui créeront des économies d’échelle et un effet d’entraînement mutuel. Cela permettra à moyen terme d’identifier et de mettre en réseau les places régionales qui composeront le réseau de places financières internationales africain, comme par exemple, Accra, Addis- Abeba, Casablanca, Dakar-Abidjan, Johannesbourg, Kigali, Kampala, Lagos, Le Caire-Alexandrie ou encore Lomé, et y attirer les grandes entreprises africaines cotées hors du continent.
Relever les défis et tirer parti des opportunités qui se présentent aux économies africaines
Le potentiel des économies africaines requiert des actions mieux ciblées pour assurer une croissance inclusive et durable du continent, en lien avec les partenaires internationaux des pays de l’Union africaine. En conséquence, il est nécessaire d’élaborer des stratégies de relance et de développement coordonnées au niveau de l’Union africaine, d’accompagner l’industrialisation du continent tant par des zones économiques spéciales que par l’évolution du tissu de petites et moyennes industries, et développer les territoires urbains, périurbains et ruraux, tout en luttant contre les inégalités. Ces stratégies ne pourront bien sûr être mises en place qu’en tenant compte des capacités et des moyens des États de l’Union africaine à engager une transition écologique soutenable à l’échelle étatique et continentale.
Les stratégies de relance et de développement en Afrique doivent être élaborées de manière coordonnée et coopérative par les pays membres de l’Union africaine, avec le soutien de leurs partenaires internationaux. Les stratégies de relance doivent émaner d‘une impulsion intracontinentale, décidée par les États africains, et seront essentiellement tournées vers le développement des infrastructures, la transition énergétique ainsi que la diffusion du numérique. Les besoins d’investissements directs dans les infrastructures sont importants, estimés à plus de 250 milliards d’euros pour les infrastructures d’électricité et 41,6 milliards d’euros pour l’assainissement et l’eau potable d’ici 2030 selon la Banque mondiale. Par ailleurs, la diffusion du numérique à tous les niveaux de l’économie est essentielle. Aujourd’hui, plus de 500 entreprises africaines proposent des innovations technologiques dans les services financiers, et quelques 640 pôles technologiques sont opérationnels sur l’ensemble du continent. Toutefois, moins de 31% des entreprises sont aujourd’hui numérisées sur le continent. Le travail du Mécanisme africain d’évaluation par les pairs (MAEP) devra porter sur l’évaluation des stratégies de développement existantes et sur les politiques économiques. Ce travail doit être piloté par un Comité pour la Coordination des Stratégies de Développement (CCSD) créé à horizon mai 2022. Une réactualisation de l’Agenda 2063 pourra inclure l’ensemble des actions prévues dans ce rapport.
La coordination entre les pays membres de l’Union africaine implique une coordination avec les partenaires de l’Afrique, notamment en matière d’investissement vers les secteurs essentiels. Les flux financiers intracontinentaux et à destination du continent doivent être fléchés vers les secteurs prioritaires – le développement des infrastructures, la transition énergétique, l’accès à l’eau, à l’énergie, l’agriculture, la formation et la diffusion du numérique – afin de créer une croissance plus inclusive et durable en Afrique, en cohérence avec l’Agenda 2063. Cette mobilisation des flux devra émaner des stratégies de relance et de coordination des pays membres de l’Union africaine entre eux, puis avec le concours de leurs partenaires et passer par la Plateforme sur l’Investissement et la Transformation Productive – initiative conjointe de la Commission de l’Union africaine et du Centre de développement de l’OCDE – afin d’inclure et de coordonner l’ensemble des partenaires de l’Afrique.
L’industrialisation de l’activité économique africaine est essentielle et passe par l’intégration des chaînes de valeur à tous les niveaux. Cela sera permis entre autres grâce à l’émergence de zones économiques spéciales, au développement des petites et moyennes industries (PMI), à l’inclusion des femmes et la valorisation locale des matières premières. Pour renforcer la dynamique positive dans le commerce et l’entrepreneuriat africain, le développement d’une nouvelle génération de zones économiques spéciales est essentiel. L’Union africaine, à travers son agence de développement, devra renforcer les 200 zones économiques spéciales déjà existantes sur le continent pour valoriser les territoires et les chaînes de valeur à haut potentiel. La cotation sur les marchés financiers des entreprises qui y sont implantées doit également être favorisée afin d’attirer davantage d’investissements en promouvant la spécialisation dans des phases spécifiques. Il est également important de revoir l’approche de la fiscalité sur la consommation, des salaires versés et de régler la circulation de marchandises des zones économiques spéciales vers le reste des territoires dans lesquels elles sont ancrées. Cette stratégie d’industrialisation doit également passer par le développement et le soutien aux petites et moyennes industries. Ces dernières sont isolées car les zones économiques spéciales opèrent avec des groupes de grandes entreprises ou de tailles intermédiaires. Une petite entreprise ne peut pas intégrer verticalement le processus productif et rachète une grande partie des produits intermédiaires ou complémentaires à des entreprises voisines. Afin de promouvoir la transformation de simples agglomérations de petits artisans traditionnels, souvent informels, en système de petites entreprises industrielles spécialisées, il faudra créer des services pour accompagner l’entrepreneuriat local dans la gestion et l’adoption des nouvelles technologies – notamment le numérique, le recours au contrôle de qualité et la certification des produits, l’analyse des tendances du marché ou la gestion administrative. Une cartographie des agglomérations de PMI existantes doit être réalisée, ainsi qu’une analyse comparative des politiques de soutien à l’entrepreneuriat des jeunes et des femmes déjà en œuvre. 50 zones réparties sur le territoire continental seront sélectionnées pour mener des expérimentations coordonnées, afin de construire une politique pour le développement des systèmes d’entreprises, qu’ils soient formels ou informels. Il conviendra également d’augmenter les taux de valorisation des matières premières, avoisinant actuellement 10% sur le continent, pour favoriser l’appropriation des ressources et des richesses par le tissu économique local, de porter ce taux de valorisation à 40%, ce qui permettra de réduire les coûts des produits de consommation courante et de rendre plus compétitives les entreprises africaines dans le commerce extérieur, le continent africain ne pesant que pour 3% du commerce mondial. Enfin, pour aboutir à une croissance inclusive et durable, il sera essentiel de promouvoir le rôle des femmes – 24% des femmes africaines étant entrepreneures – dans l’économie réelle et favoriser leur autonomie. Cela passera entre autres par un soutien financier à l’entrepreneuriat féminin estimé à 36,5 milliards d’euros par la BAfD. L’ensemble de ces initiatives doit être mené par le CCSD, en adéquation avec le développement de la ZLECAf.
La forte croissance démographique en Afrique concernera aussi bien les villes que les zones rurales, ce qui implique une stratégie globale de développement des territoires urbains, périurbains et ruraux, ainsi qu’une stratégie de lutte contre les inégalités et de mise en œuvre d’une transition énergétique à l’échelle continentale. En ce sens, l’aménagement des villes devra être conçu en adéquation avec les objectifs de l’Agenda 2063. Le Consortium pour les infrastructures en Afrique estime le déficit de financement entre 59 et 93,4 milliards d’euros par an, dont un tiers pour les villes et un tiers pour les zones rurales, selon les Cités et Gouvernements Locaux Unis (UCLG). Dans les zones rurales, l’agriculture devra utiliser plus efficacement les terres arables disponibles, qui représentent 60% des terres non exploitées dans le monde.
Il sera surtout nécessaire de créer de solides synergies entre les villes et les territoires ruraux, ce qui ne sera faisable qu’avec une coordination entre les grandes villes, les villes intermédiaires et les villages. L’objectif de long terme est ainsi de développer les territoires de manière durable en mobilisant les fonds nécessaires tout en intégrant les chaînes de valeur nationales et continentales et d’augmenter considérablement la part des matières premières transformées localement afin de réduire le coût des produits de consommation. Afin d’éviter que le développement des villes ne se fasse au détriment des zones rurales, il est essentiel de veiller à améliorer le niveau de vie moyen tout en luttant contre les inégalités. Cette lutte contre les inégalités est essentielle, en particulier concernant la prévalence du secteur informel. Le développement d’une sécurité sociale adaptée est nécessaire, pour traiter des effets du secteur informel sur les inégalités, de la volatilité des revenus, de la natalité et de l’incertitude. Il faut mettre en place une couverture avec un seuil de remboursement des soins d’en moyenne 200 euros par an et par personne pour les populations les plus précaires et pour les traitements médicaux et vaccins de base. Couvrir 20% de la population africaine, soit 243,2 millions de personnes avec un tel montant coûterait environ 48,6 milliards d’euros par an. La coopération sanitaire, et l’amélioration de la couverture vaccinale en particulier, sont tout autant essentielles au développement des économies africaines et à la lutte contre les inégalités. La santé se révèle désormais être un bien commun planétaire, et la distribution du vaccin doit requérir la même considération.
Synthèse des propositions
Assurer la stabilité financière en Afrique
- Proposition 1 : Créer un Mécanisme Africain de Stabilité Financière (MASF) sous l’égide du Comité Financier de l’Union africaine
- Proposition 2 : Développer le MASF par les régions puis l’unifier au niveau continental
- Proposition 3 : Financer le lancement du MASF à hauteur de 200 milliards d’euros en mobilisant notamment les Droits de Tirage Spéciaux
Réduire les coûts de financement des investissements
- Proposition 4 : Créer une agence de rating panafricaine
- Proposition 5 : Mettre en place un dispositif de rehaussementdu crédit
- Proposition 6 : Favoriser l’émergence d’un réseau de places financières en Afrique
Relever les défis et tirer parti des opportunités qui se présentent aux économies africaines
- Proposition 7 : Coordonner les plans de relance et de développement dans des stratégies continentales
- Proposition 8 : Canaliser et flécher les flux financiers à destination de l’Afrique dans le cadre des stratégies continentales
- Proposition 9.1 : Créer les conditions de développement et de rentabilisation des zones économiques spéciales
- Proposition 9.2 : Stimuler l’économie par le développement des agglomérations de Petites et Moyennes Industries (PMI)
- Proposition 9.3 : Développer les chaînes de valeur pour améliorer la valorisation locale des matières premières
- Proposition 9.4 : Promouvoir le rôle des femmes dans l’économie réelle et assurer leur autonomie
- Proposition 10.1 : Développer une urbanisation durable et accompagner l’émergence d’une nouvelle agriculture
- Proposition 10.2 : Assurer l’amélioration du niveau de vie tout en luttant contre les inégalités et financer le développement de la couverture vaccinale en Afrique