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Quelles marges de manœuvre pour les finances publiques ?

Alors qu’il s’apprête à annoncer la composition de son gouvernement, le nouveau Premier ministre, Michel Barnier, doit préparer activement le prochain projet loi de finances. Jean-Paul Betbeze rappelle les enjeux de la construction du budget dans l’actuel contexte financier déprimé.

C’est la question que pose le Premier ministre Michel Barnier à ceux qu’il rencontre pour former son équipe gouvernementale, « afin que vous puissiez agir » ajoute-t-il, pour susciter espoir et idées. Impossible de lui répondre qu’il n’y en a pas ou peu, si l’on veut en être. Mais que dire précisément ? Le minimum est d’avoir lu la dernière note de l’Insee pour savoir où l’on en est, plus le rapport Draghi pour savoir où la Commission européenne, et sans doute aussi les marchés, souhaitent que l’on aille. Et que pensent les partis, le Parlement, les électeurs, le président de la République ?

Ralentissement mondial

Pour répondre à cette question des marges de façon technique, il nous faut partir de la situation telle que l’Insee la mesure (et pas de celle « ressentie » dans les sondages ou présentée par certains politiques). C’est celle d’une reprise fragile autour de 1%, avec des consommateurs inquiets, des entrepreneurs qui attendent pour investir et déstockent, avec une baisse de leurs marges. Ceci fait que, paradoxalement, c’est le commerce extérieur qui tire l’attelage !

Avec la morosité de l’économie nous importons moins, les entrepreneurs et les entreprises font tous leurs efforts pour trouver des marchés extérieurs. Aujourd’hui, ce sont les gros bateaux vendus qui gonflent l’export. La finance veut des baisses de taux ce mois-ci aux États-Unis. Elle a eu lieu celle du 12 septembre en zone euro, en attendant d’autres. La raison « officielle » de ces décisions est la désinflation en cours : 2,5% aux États-Unis, 2,2% en zone euro, 1,9% en France, ce qui fait baisser les taux longs à 2,8% en France et maintient le Cac 40 autour de 7 500 points. La vérité, derrière, est le ralentissement mondial, qu’il faut à présent conjurer.

Désinflation compétitive

C’est dans ce contexte, aussi paradoxal que cela puisse paraître, qu’il faut profiter de cette menace de récession pour sortir des anticipations de reprise par la demande, avec hausse du SMIC et abandon de la réforme des retraites, telles que diffusées par LFI.

Accroître le SMIC fait monter les coûts des entreprises, notamment petites, et les prix : une aubaine pour les concurrents internationaux en quête de débouchés. Les marchés financiers ne manqueraient pas de réagir, avec hausse des taux longs et baisse de la bourse, ouvrant la porte à une crise financière. C’est la désinflation compétitive seule qui créera et accroîtra les marges de manœuvre budgétaire, pour augmenter croissance et emploi.

Rien ne sera immédiat pour sortir la morosité actuelle

Le budget doit stabiliser la dépense publique en augmentant les dépenses de 1,5%, par exemple. En matière de finance, il faut indexer le livret A et le SMIC aux seuls prix : ceci permettra de discuter des salaires au-dessous du SMIC dans les branches, pour les augmenter et d’ouvrir une conférence sur les salaires, où on débattra des carrières, avec des formations tout au long de la vie et des plans d’investissement dans l’entreprise, bases de compléments de retraite.

Le ministère du logement intervient alors, pour mener des programmes de construction de logements sociaux, en liaison avec des plans d’épargne renforcés. Ajoutons ici des programmes régionaux de recherche à développer, en fonction des spécialisations des entreprises et en liaison avec les facultés et les centres d’apprentissage. Enfin, les technologies nouvelles seront utilisées pour dépister les abus et les fraudes fiscales et sociales.

Rien ne sera immédiat pour sortir de la morosité actuelle, ni ne se fera sans explications et mesures des résultats obtenus, pour en faire bénéficier les salariés et l’emploi. L’essentiel viendra d’une amélioration profonde de l’offre, qui n’a rien à voir avec le leurre d’une politique de la demande, faussement attribuée à Keynes. Il n’envisageait un soutien à la demande par le crédit que pour s’extraire de la dépression. L’inverse est suicidaire, destiné à gagner les élections, effondrant les marchés. Il faudra les convaincre d’entrer dans des logiques de long terme, c’est là qu’il faudra élargir ses marges de… vision.

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