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La BCE baisse ses taux, la Fed les maintient, l’or monte 

Lors de leurs dernières réunions respectives de part et d’autre de l’Atlantique, la Banque centrale européenne et la réserve fédérale américaine ont pris des décisions opposées : baisse de taux en Europe, immobilisme aux Etats-Unis. Jean-Paul Betbeze revient sur les raisons de cette divergence

Heureuse Christine

Christine Lagarde, la patronne de la Banque centrale européenne, a joué sur du velours le 30 Janvier 2025 en baissant ses taux de 25 points de base à 2,9% pour une inflation à 2,4%, alors que la croissance stagne. Mieux encore, elle ajoute qu’elle trouve sa politique monétaire restrictive, autrement dit qu’elle pourra continuer ses baisses pour soutenir une croissance. Elle en a besoin, face à une inflation qui ne menace pas de repartir, avec un « taux neutre » (publié le 7 février) qui approche… mais qui pourrait réduire l’actuelle unanimité baissière. Rien n’est parfait

Pauvre Jay

Bien différente, moins facile, est la situation de Jay Powell, le patron de la Banque centrale américaine. Il maintient des taux à 4,5%, pour une inflation à 2,9% qui, dit-il, résiste avec une hausse des prix de 4% dans les services, alors qu’elle est nulle dans l’alimentaire. Lors de la conférence de presse, où il présente les décisions de la Fed, les journalistes lui demandent comment il réagit à l’injonction de baisse des taux du président Trump. Il répond qu’il ne se soucie que de son double mandat : 2% d’inflation avec le plus d’emploi. Et quand d’autres journalistes lui demandent comment il réagira aux décisions du président de monter les taxes à l’importation, il répond de même qu’il attend les textes sur l’ensemble du programme, notamment sur les forages pétroliers, les baisses de normes, plus les réactions et les premiers chiffres pour réagir. On aura compris qu’il ne veut pas se laisser entraîner dans des débats politiques. Pas de surprise, il attend les faits, gagne du temps et évite d’alimenter les réactions, notamment des marchés. Il est dans son rôle..

L’or monte

A 2 800 dollars l’once fin janvier 2025, le prix du métal atteint son plus haut historique à Londres, où il est coté, ou plutôt depuis New York d’où viendraient les ordres d’achat. Pourquoi ? On pourrait penser à des inquiétudes sur la situation mondiale, sur les choix politiques de Donald Trump, à moins qu’il ne s’agisse de stocker quelques lingots avant la menace de taxe sur les importations qu’il brandit. On ne sait rien, on ne sait jamais, en tout cas la rumeur peut servir.

Rumeurs, quand tu nous tiens

La bourse américaine a été en effet secouée, il y a quelques jours, par l’annonce d’une startup chinoise sur sa découverte d’un procédé concurrençant frontalement Nvidia dans l’Intelligence Artificielle. Aussitôt, la valeur vedette du Nasdaq plonge de 150 dollars à 125. Les experts vont se pencher sur ce produit, qui annule en quelques minutes l’annonce du président Trump : 500 milliards de dollars pour un fonds spécial nommé Stargate, destiné à mettre son pays en avant mondial de l’IA. DeepStack selon son nom ou Deepfake (?), c’est en tout cas l’illustration des enjeux sur la frontière mondiale des innovations. Les luttes se jouent non plus entre sociétés multinationales, mais entre les deux grandes puissances mondiales, on aura reconnu États-Unis et Chine, avec des centaines de milliards de dollars qui peuvent disparaître, à la différence de la barre d’or. 

Une nouvelle incertitude

Jay Powell a bien raison d’insister sur la nouvelle incertitude qui est la nôtre, non plus celle où les cas extrêmes sont extrêmement rares, mais où leur probabilité d’arrivée augmente. Entre guerres, réchauffement climatique, révolution technologique et tensions sociales et politiques, il est essentiel que les politiques monétaires demeurent, pour ancrer les anticipations. Notre monde n’est pas gaussien, pour reprendre l’élégante courbe de Gauss où le pire est rare : il est toujours là. Et c’est à la finance de nous en avertir et de nous en protéger, au-delà des critiques que l’on entend à son sujet. Répartir les risques en allant vers les valeurs de repli, accepter des rendements moyens contre les excès qui veulent ou peuvent nous déstabiliser : il n’y a que la sagesse.

Nous voilà embarqués pour quatre ans de cahots : c’est peut-être le prix à payer pour retrouver la sagesse !

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