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Quel compromis pour un budget ?

La dégradation de la note de la France par Fitch ravive le spectre d’un cercle vicieux entre dette, déficit et instabilité politique. Pour éviter l’asphyxie budgétaire et restaurer la confiance des ménages comme des investisseurs, l’exécutif cherche un compromis fragile : concessions ciblées sur les retraites et la fiscalité, concertation sur l’emploi et les salaires, mais sans renoncer à la rigueur ni à l’âge pivot. Une équation délicate, alerte Christian de Boissieu, où crédibilité financière et consensus social devront impérativement cohabiter.

Bien sûr, la dégradation de la note de la France par Fitch n’est pas une bonne nouvelle, même si elle était attendue. Les autres agences de notation vont probablement suivre. Désormais, il faut tout faire pour enrayer ce cercle vicieux dans lequel les taux d’intérêt montent, les charges d’intérêt de la dette s’alourdissent au point de rendre irréel tout débat sur des marges de manœuvre budgétaires.

L’instabilité politique nourrit l’arrêt des investissements, la défiance des consommateurs qui accumulent des épargnes de précaution, la défiance aussi des investisseurs étrangers et l’instabilité financière.

L’exécutif contraint de lâcher du lest

Un compromis entre le nouveau Premier ministre et une partie de la gauche semble envisageable. On voit ce sur quoi l’exécutif va lâcher du lest par rapport au plan Bayrou : l’abandon, déjà acté, de la suppression de deux jours fériés, une mesure fiscale sur les très hauts patrimoines fort différente de la taxe Zucman, un moindre ciblage des retraités, la réouverture de la concertation sur certains dossiers de la réforme des retraites (pénibilité, parcours des femmes, carrières longues)…

Une concertation qui aurait aussi intérêt à déboucher sur des mesures (enfin !) concrètes pour augmenter le taux d’emploi des jeunes et des seniors. En tant qu’enseignant, je déplore la remise en cause partielle de l’apprentissage et de l’alternance, alors que ces dispositifs permettent de rapprocher (enfin !) l’éducation et l’entreprise.

Tout ne dépend pas du gouvernement. Une concertation sur les salaires pourrait être un signal utile. Surtout pas un nouveau Grenelle, mais une approche décentralisée pour évaluer les marges d’augmentation potentielles dans pas mal d’entreprises, bien sûr pas dans la PME du coin de la rue qui lutte pour sa survie financière. Le lien entre gains de productivité et salaires n’a pas grande portée au plan global. Mais il trouve son sens dans l’entreprise.

Un compromis sous contrainte

Le compromis qui se dessine doit respecter quelques contraintes fortes :

  1. Ne pas remettre en cause le principe (sauf les exceptions évoquées) de l’âge pivot de la retraite à 64 ans.
  2. Ne pas augmenter le taux global de prélèvements obligatoires en France. Ainsi, une mesure fiscale sur les hauts patrimoines devrait s’accompagner d’une réduction d’autres impôts, en particulier d’une reprise de la diminution des impôts de production.
  3. Afficher un plan d’économies budgétaires. La maîtrise des dépenses publiques, aux trois étages de la norme européenne (Etat, protection sociale, collectivités territoriales), n’a de sens que dans une programmation à cinq ans.
  4. A court terme, ne pas laisser le déficit public pour 2026 aller au-delà de 5 % du PIB. L’objectif de 4,6 % du budget Bayrou va devoir être actualisé, mais le moins possible. Par exemple, viser 4,8 %. Ce qui compte avant tout, c’est de tenir des objectifs ambitieux mais nécessaires. Il y va de l’intérêt de tous, y compris des salariés, que la France évite une nouvelle dégradation de sa note, de ses conditions de crédit et donc des taux payés par les emprunteurs, qu’ils soient publics ou privés.

Dans le contrat social, implicite ou explicite, qui prendra forme, toutes les parties prenantes devront respecter leurs engagements. Sont en jeu notre crédibilité et notre capacité à engendrer dans la durée de la croissance, des emplois, et peut-être (on peut toujours rêver !) un zest de consensus…

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