Cet article est extrait du deuxième numéro de la revue Mermoz, « Le toit nous tombe-t-il sur la tête ? ».
Ce second numéro de Mermoz plonge au cœur des difficultés de la société française. Il le fait avec sa méthode habituelle, interroger des acteurs et témoins éclairés d’une variété telle que l’on peut considérer que l’ensemble des points de vue a été développé. D’une certaine manière, c’est la marque de fabrique de Mermoz, comme revue de sciences économiques et sociales, qui se fixe comme règle de faire disparaître les frontières entre les disciplines traditionnelles : économie, sociologie, urbanisme, géographie… Le logement est peut-être la principale préoccupation en matière de pouvoir d’achat pour une très grande partie de la population, puisque les dépenses qui lui sont consacrées sont désormais les premières, mais surtout puisqu’elles sont un obstacle à l’épanouissement nécessaire de la jeunesse, principal atout de notre pays.
Et pourtant, dans le cadre d’une expérience unique, dialoguer avec 90 000 jeunes de 18 à 30 ans de toutes catégories sociales, nous avons découvert l’énorme difficulté à laquelle ils sont confrontés. Plus de la moitié d’entre eux ne se sent ni considérée, ni bien dans sa vie, ni représentée, ni vraie actrice de la société. Quel drame cela représente-t-il ! Il est clair que si les jeunes à l’université ou dans la vie active pouvaient trouver un logement et, pour ceux qui sont désocialisés, trouver des lieux d’accueil, l’on verrait sûrement la société française retrouver des couleurs, de l’énergie et une perception claire de ce qu’est le progrès. Ces mêmes jeunes nous font une révélation qui peut rendre optimiste : 86 % d’entre eux considèrent que le succès de leur vie ne passe pas par l’argent. Certes, c’est le propre de la jeunesse de porter des valeurs très humanistes, mais jamais un tel pourcentage des 18-30 ans n’a exprimé une telle volonté de donner sens à son existence. C’est un immense cri d’espoir pour notre société, mais il ne perdurera pas si l’on ne fournit pas de manière urgente ces lieux où chacun peut vivre, seul ou dans un univers familial.
Fidèle à sa réputation, Mermoz, émanation du Cercle des économistes, fait également parler sa présidente qui revient sur un de nos engagements les plus importants, le Prix du Meilleur Jeune Économiste, en s’interrogeant sur la féminisation de notre métier d’économiste universitaire. De même, nous sommes allés à Singapour pour nous interroger sur le concept et la réalité de la zone indo-pacifique, avec encore beaucoup d’interrogations sur son devenir. Puis Pauline Rossi nous pose une des questions les plus fortes de notre période : peut-on imaginer une Terre dont la population continue de croître sans s’arrêter ? Pour nous autres, c’est une très ancienne interrogation qu’avait posée Thomas Malthus et qui nous revient avec d’autant plus de force que les prévisions des démographes nous interrogent, même si les taux de fécondité semblent venir les remettre en cause… Merci à nos deux rédacteurs en chef, Clément Lebourg et Alban Schneyder, de nous faire aussi bien réfléchir à une malheureuse forme d’impuissance.