Dans un contexte de forte dégradation des finances publiques, et de l’explosion du déficit public devant s’élever à près de 6% cette année, le sujet de la compétitivité s’impose au cœur du débat économique. Pour Anne-Sophie Alsif, ce débat doit permettre de trouver des sources de croissance potentielles
La compétitivité est souvent assimilée à une entreprise et peut se définir comme sa capacité à maintenir ou accroître ses parts de marché. C’est son aptitude à faire face à la concurrence. Pour un Etat, l’Union européenne définit la compétitivité comme la capacité d’un pays à améliorer durablement le niveau de vie de ses habitants, et à leur procurer un haut niveau d’emploi et de cohésion sociale, dans un environnement de qualité. Elle peut s’apprécier par l’aptitude des territoires à maintenir et à attirer les activités, et par celle des entreprises à faire face à leurs concurrentes.
La compétitivité peut être de deux ordres : la compétitivité prix et hors prix. Selon le ministère de l’Économie, des Finances et de l’Industrie, la compétitivité-prix est la capacité à produire des biens et services à des prix inférieurs à ceux des concurrents pour une qualité équivalente. Elle repose sur la capacité à produire une offre à des coûts inférieurs à ceux supportés par les entreprises du même secteur. Elle peut aussi s’appuyer sur une marge unitaire plus faible, si les coûts de production sont identiques.
A l’inverse, la compétitivité hors prix, ou structurelle, est la capacité à imposer ses produits ou services indépendamment de leur prix (qualité, innovation, services après-vente, image de la marque, délais de livraisons, capacité de s’adapter à une demande diversifiée.). Cette différenciation est essentielle car, pour un pays comme la France, le positionnement de l’appareil productif sur le haut de gamme permet de dégager plus de valeur ajoutée et de ne pas être en concurrence avec les pays ayant de faible coût de main-d’œuvre.
La France, dans son processus de désindustrialisation entamé dans les années 2000, a centré son industrie sur un niveau de gamme moyen avec des prix à la vente élevés. Cette stratégie a fait perdre de nombreuses parts de marché et a amoindri sa compétitivité prix. L’un des secteurs industriels symboliques de cette évolution est le celui de l’automobile. Cette stratégie a réduit la part de l’industrie dans le PIB au profit d’une économie davantage orientée vers les services. En effet, en France, la part de la valeur ajoutée manufacturière dans le PIB est passée de 14,5% en 2000 à 9,7% en 2023.
Un « Etat compétitif », notamment dans le cas de la France, serait un Etat augmentant sa compétitivité hors coût à travers une réindustrialisation dans des secteurs à haute valeur ajoutée et une forte hausse de l’investissement en innovation. Cette politique devrait être sanctuarisée et s’inscrire dans le temps car redevenir compétitif est un objectif de long terme. La compétitivité aujourd’hui d’un Etat, particulièrement depuis la guerre en Ukraine, repose également, pour une part importante, sur le coût de l’énergie, notamment de l’énergie décarbonée. La France détient de véritables avantages comparatifs mais doit les développer. De fait, la transition écologique doit être considérée comme une véritable opportunité pour la France à se réindustrialiser et à devenir un véritable « Etat compétitif ».