C’est la question que se posent les marchés d’actions, après la bonne année 2023. En effet, le Dow Jones y a augmenté de 14%, le CAC 40 de 16%, et la bourse allemande, le DAX, de 20%. Et ceci en dépit des inquiétudes qui apparaissaient fin 2022. Ceci peut-il continuer ?
Pour répondre, il faut étudier les cinq paramètres qui ont permis ce succès, en se demandant s’il peut se poursuivre.
Le premier paramètre, positif, est celui de la révolution technologique. Celle qui a permis à Apple de monter de 50%, à Amazon de 80% et à NVIDIA de 240%. Réponse : oui. Il n’y a aucune raison pour que ce mouvement s’arrête : la preuve en est Tesla dont la capitalisation boursière atteint 800 milliards de dollars, douze fois Stellantis, pour un PER entre 60 & 70 contre 4 à 5 pour la « vieille » entreprise française. La bourse aime les innovations et les entrepreneurs, même excessifs.
Guerres, inflation, climat : un cocktail d’incertitudes
Le deuxième paramètre, positif aussi, est celui de la lutte contre les bouleversements climatiques, après la COP28 qui a conforté la recherche pour des substituts au pétrole. L’Intelligence Artificielle va partout aider l’innovation, contre sécheresses et inondations, pour changer le logement, la mobilité, le bureau, la ville : de fantastiques nouveaux marchés !
Le troisième paramètre, encore positif, est celui des succès des banques centrales pour lutter contre l’inflation. Certes, elles ont été surprises par sa brusque remontée, mais elles ont réagi en montant vite et fort leurs taux d’intérêt. Aujourd’hui, la hausse des prix n’est plus que de 3,1% aux États Unis et 2,4% en zone euro. Les taux d’intérêt à court terme étant de 5,5% chez les premiers et de 4,5% chez la seconde, on peut penser qu’on en a fini avec les hausses et que les baisses vont s’ensuivre. C’est d’ailleurs l’idée des taux longs, partout à la baisse. Tout ceci est évidemment bon pour les bourses.
Le quatrième paramètre est négatif. Nous sommes au milieu de guerres, après celle d’Ukraine qui se poursuit, pour autant qu’elle sera financée par les États-Unis. Vient celle entre Israël et Gaza, dont on ne sait où et quand elle va finir. Cette série n’est pas achevée, si l’on songe à ce qui se passe en Afrique, au Venezuela qui regarde de très près son voisin Guyana, peu peuplé mais très riche en pétrole, sans compter les questions que l’on a en permanence sur la Chine à propos de Taïwan, à quelques jours de l’élection présidentielle dans l’île (sans oublier la Corée du Nord). En 2023, les marchés ne traitaient qu’une guerre. Aujourd’hui elles se multiplient, plus dangereuses, plus longues, plus chères, plus incertaines, plus mêlées.
Une année électorale partout dans le monde
Le dernier paramètre est celui auquel tout le monde pense : l’élection présidentielle américaine. Les choix de candidats par Etats continuent, certains refusant d’inclure Trump à la suite de ce qu’ils appellent : la tentative de subversion contre le Capitole. Mais tout dépend de la Cour Suprême, qui, pour le moment, réfléchit… Ce n’est qu’au milieu de l’année 2024 que nous saurons ce qu’il adviendra. Les marchés pensent que Trump sera toujours là, donc Biden aussi. En fait, même s’ils ne le disent pas, ils cherchent un homme fort pour diriger la première puissance mondiale, dans un monde qui ne l’a jamais autant contestée. Ils préfèrent la simplicité de la force à la complexité des réflexions. Dans ce contexte, leur prévision optimiste pourrait se poursuivre plus aisément.
Bien sûr, d’autres paramètres existent. Outre l’élection à Taïwan, il faut attendre celle de Moscou, plus facilement prévisible… et celle pour l’Europe, qui peut affaiblir sa dynamique. Au fond, les marchés peuvent penser que les révolutions technologiques et les succès contre les variations climatiques, liés à la baisse de l’inflation, sont les paris à poursuivre. Pour la politique, qui sera décisive en 2024, ils devraient continuer à parier sur la force et la simplicité trumpienne. Ceci n’est pas nécessairement pour nous rassurer, mais nous n’avons pas grand-chose d’autre.