La relance par la politique budgétaire et fiscale est souhaitable de la part des pays membres ayant des marges de manœuvre comme l’Allemagne et les Pays-Bas. Mais elle est hypothétique compte tenu de leur attachement aux excédents. Une voie possible consiste à mobiliser l’épargne privée. La Banque européenne d’investissement est un outil pour le faire.
Dans la zone euro, la politique monétaire a atteint ses limites. En rajouter ne servirait à rien et rendrait plus compliquée l’inversion, un jour, de la stratégie monétaire.
La relance par la politique budgétaire et fiscale est souhaitable de la part des pays membres ayant des marges de manœuvre comme l’Allemagne et les Pays-Bas. Mais elle est hypothétique vu la défiance des pays excédentaires vis-à-vis des pays déficitaires. Une solution budgétaire coopérative au niveau européen est peu probable à court terme, même si l’Allemagne au bord de la récession y trouverait son compte. Une Allemagne qui vient d’annoncer un plan de 100 milliards d’euros d’ici à 2030 pour le climat, mais dans le respect de l’orthodoxie budgétaire. Nécessaire sans doute, insuffisant sûrement.
Recycler encore plus d’épargne privée
Dans ce contexte, l’Europe doit mettre l’accent sur une voie plus consensuelle, une mobilisation élargie de l’épargne privée. Avec le plan Juncker, qui court jusqu’en 2020, elle a déjà réussi à mobiliser plus de 500 milliards d’euros au profit de l’innovation, de la R & D, des PME, de l’énergie… Le programme InvestEU va le prolonger sur 2021-2027 avec une cible de 650 milliards d’investissements additionnels.
Avec la croissance qui ralentit et une inflation en deçà de l’objectif de la BCE, c’est maintenant qu’il faut intensifier l’investissement en Europe, pas dans cinq ou huit ans. En renforçant le rôle des organismes au cœur du plan Juncker, la Banque européenne d’investissement (BEI) et les fonds attachés (Fonds européen d’investissement et Fonds européen pour les investissements stratégiques).
La BEI recycle de l’épargne, empruntant sur les marchés financiers et allongeant éventuellement l’échéance de cette épargne pour l’investir dans des projets et des secteurs prioritaires pour l’emploi, une croissance plus inclusive, le développement durable, l’expansion locale, la compétitivité bien sûr. Malgré la crise ou à cause d’elle, les ménages européens épargnent abondamment. L’objectif pour le groupe BEI et les banques nationales de développement avec lesquelles il coopère doit être de recycler encore plus d’épargne privée. En s’appuyant sur des véhicules financiers adéquats et les bonnes incitations. Cette voie serait de toute façon complémentaire de l’hypothétique relance budgétaire au niveau européen.
Augmenter le capital de la BEI
Une première étape consiste à augmenter le capital de la BEI. Une opération nécessaire pour qu’elle conserve la meilleure notation, emprunte et prête aux meilleures conditions. Les Allemands et les Néerlandais seront a priori moins réticents à une telle opération qu’à une relance budgétaire. A partir de là, on pourrait compter sur un double effet de levier : la capacité accrue de financement de la BEI est un multiple de l’augmentation de son capital ; le financement public catalyse des financements privés.
Il ne s’agit pas pour autant de blanc-seing donné à la BEI et aux banques nationales de développement. L’épargne abondante et les taux d’intérêt bas quand ils ne sont pas négatifs ne justifient en aucune manière le gaspillage. Le plan Juncker dégage déjà plusieurs leçons. Il faut rester vigilant dans l’analyse des risques pris, dans la priorité à accorder aux investissements vraiment additionnels (ceux qui n’auraient pas été réalisés sans le dispositif européen) et dans le respect des objectifs climatiques et de cohésion sociale et territoriale.