Entre regain pandémique partout dans le monde, impact du reconfinement en Europe et élection présidentielle américaine, la planète est confrontée à de vives tensions. Jean-Paul Betbeze analyse les issues possibles pour les marchés financiers, la croissance et les secteurs appelés à tirer leur épingle du jeu.
COVID-19 : quatrième phase de propagation, quand et comment ceci va-t-il s’arrêter, avec quels effets sociaux, économiques, financiers et politiques ? La première phase, très petite par rapport à ce qui est arrivé ensuite, commence en Chine en février, puis viennent l’Europe en avril, les États-Unis et l’Amérique Latine en juillet, puis un retour en Europe maintenant, sans qu’aucun autre foyer ne s’apaise (hors Chine semble-t-il). La pandémie dépasse 42 millions de cas et 1,2 millions de décès, touchant en premier les États-Unis avec 9,1 millions de cas (et la France en 5° position mondiale désormais, avec plus de 1,2 millions de cas).
K ? C’est « la » lettre qui va pour « la » reprise de l’activité, autrement dit : pour « toutes ». Dans le K en effet, il y a, avec la partie haute de la lettre (à droite), des reprises, mais variables, allant de moyennes à très fortes ; dans la partie basse de la lettre (toujours à droite), des ralentissements moyens, forts, très forts, jusqu’à des effondrements. K, c’est la grande dispersion des cas, si l’on ose dire, rien à voir avec le V auquel plus personne ne croit (sauf pour la Chine), le VV ou même la reprise « en aile d’oiseau », image poétique du Gouverneur de la Banque de France, pour dire que tout ira graduellement mieux. K, c’est « en même temps », le meilleur et le pire.
Elections américaines : les États-Unis annoncent une reprise de 33,1% au troisième trimestre, après un plongeon de 31,4% au deuxième. Ne cédons pas aux effets de loupe de ces calculs : le PIB américain est toujours 3,5% au-dessous de son niveau d’avant COVID-19 et de complexes élections s’approchent. Nous verrons ce qu’elles donnent, mais il faut être conscient des risques croissants actuels, entre montée des cas de COVID-19 et signes accrus de ralentissement, tensions politiques internes et externes dans, et depuis, la première économie du monde.
Un autre programme de soutien budgétaire est en cours de discussions politiques, la Banque Centrale continue ses achats de bons du trésor et le dollar monte par rapport à l’euro (suite aux annonces inquiètes de Christine Lagarde le 29 octobre). En réalité, le dollar paraît la plus forte monnaie du monde, Trump ou Biden. La même histoire arrive ici : un rebond de 18% au troisième trimestre après -13%, mais en retrait de 4,3% sur un an, et avant que le nouveau confinement ne frappe !
Bourses : elles ont fait leurs choix. Le Nasdaq a progressé de 28% depuis janvier, même après les terribles nouvelles du virus. Pour les investisseurs, les nouvelles technologies seront les gagnantes de la pandémie : la digitalisation se répand plus vite, dans les ménages, les entreprises, les bureaux et les commerces. Suit la Bourse de Shanghai (+7%), avec la reprise chinoise qui se consolide, unique exemple de reprise en V. De l’autre côté du spectre, la bourse anglaise perd plus de 25%, avec la forte remontée des cas de COVID-19 et le Brexit. A peine moins touché, le Cac 40 est en baisse (-23%) payant le prix des tensions religieuses, du COVID et d’un risque de replongée, avec des valeurs bancaires, d’assurances et pétrolières à la peine. Le Dow Jones (-7%) et le Dax (-11%) replongent : contre le virus, il n’y a que la vraie croissance, surtout high-tech.
Donc, du côté des crises annoncées par le bas du K, il y a la grande distribution, l’hôtellerie-restauration, les constructeurs d’avion ou le tourisme. Ce sont surtout les biens et services « supérieurs » qui souffrent, ceux de la longue phase d’expansion qui vient de s’arrêter. Il va y avoir partout des OPA et des concentrations. Les banques donneront des exemples de tout : en bonne forme, les grandes banques d’affaires américaines, grâce notamment à toutes les concentrations qu’elles financent et organisent, pourront faire leurs emplettes (en Europe ?). En méforme, les banques européennes, face à des réseaux à réduire, des marges trop faibles, des pertes sur crédits attendues et donc des consolidations compliquées à faire, dépendent des largesses de la BCE, qui vont s’accroître.
Il y a, et aura, donc des gagnants (santé, techno, Zoom, Apple encore, high-tech, startups…) et des perdants. Alors K pour la Bourse : Kassefigure ou Kolossal ? Les deux.