Une fois présenté, le plan de relance doit maintenant prendre corps. Porté sur l’offre avec les aides aux entreprises, le programme France Relance néglige-t-il la demande ? Outre ce débat, Philippe Trainar estime que l’ensemble est bien profilé pour répondre aux enjeux du moment.
Relancer l’économie engourdie par la COVID-19 peut apparaître comme un objectif trivial. Du moins si l’on se réfère aux plans de relance antérieurs où il s’agissait, à chaque fois, d’appeler les politiques monétaires et budgétaires à la rescousse pour soutenir la demande, la seule difficulté étant d’éviter l’évaporation sous forme d’importations. Aujourd’hui, le contenu de la relance est beaucoup plus problématique : notamment faut-il relancer la demande ou l’offre ?
Certains économistes recommandent de cibler la demande des ménages modestes qui auraient le plus souffert de la crise. Certes, la pandémie a fortement aggravé la situation des plus fragiles qui, victimes de la disparition de nombreux petits boulots, ont sombré dans l’indigence. Mais, le soutien à ces personnes relève de l’impératif éthique et non d’une logique de relance de la demande à laquelle il ne contribuera que très marginalement. Quant aux bénéficiaires de prestations sociales et aux salariés, ils sont loin d’être les victimes immédiates de la crise actuelle. Le Revenu de Solidarité Active a été revalorisé de 0,9% tandis que les salaires horaires ont progressé de 1,5% sur 12 mois – dans le prolongement de leur tendance antérieure – et que le taux de chômage s’inscrit en baisse par rapport à 2019.
Par comparaison, on notera que les actions et les dividendes ont lourdement chuté, respectivement de 11% et 36%. Un soutien aux ménages, au-delà des dispositifs existants (refonte du chômage partiel, report de charges, etc.), ne se justifie guère, d’autant qu’il abonderait plus l’épargne que la consommation bridée par le confinement, spontané ou imposé. Relancer par la demande n’aurait donc pas grand sens aujourd’hui.
A l’inverse, l’offre et la production sont contraintes par les impératifs de distanciation sociale qui alourdissent significativement les coûts de production unitaires. Pour absorber ces contraintes, il serait nécessaire de réaliser un effort important d’investissement, destiné à accélérer les gains de productivité (mécanisation ou robotisation de nouvelles tâches…) et à reconvertir l’appareil de production pour l’adapter au contexte nouveau (transformation de la restauration en offre de plats à emporter…). Cependant, la fonte du capital des entreprises, du fait de la baisse de valeur de leurs actifs et de l’explosion de leur endettement depuis le début de la crise sanitaire, dans un contexte où les investisseurs sont devenus frileux, rend difficile si ce n’est impossible le financement de cet effort d’investissement.
Face à ce défi, le plan de relance et les mesures de soutien à l’économie adoptés par le gouvernement ne sont pas si mal profilés. On peut certes en discuter le détail mais, par-delà la préservation à court terme des revenus des victimes du confinement, l’incitation à la transition écologique, la baisse des impôts sur la production, le renforcement des fonds propres des TPE/PME/ETI, la relocalisation de la production, le développement des technologies d’avenir, l’ajustement de la formation initiale et professionnelle ou l’investissement en santé, contribuent clairement à desserrer les contraintes qui pèsent sur l’offre productive et sur son financement, ce qui devrait faciliter l’adaptation de notre économie au contexte nouveau qui résulte de la crise sanitaire.