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L’âge de départ à la retraite, vrai problème, fausse solution

Le deuxième gouvernement de Sébastien Lecornu vient d’échapper à la censure, sauvé par la promesse de suspendre l’application de la réforme des retraites. Pour Christian Saint-Etienne, c’est ignorer la réalité d’un pays vieillissant à l’économie stagnante. Pour l’économiste, des solutions sont possibles.

Nous allons donc simultanément, en 2026, ramener l’âge de départ à la retraite à 62 ans et 9 mois tout en empruntant 310 milliards d’euros pour financer le déficit et refinancer la dette publique. La moitié de ces sommes sera demandée à des fonds de pension de pays étrangers qui ont déjà fixé l’âge de départ à la retraite à 67 ans et envisagent de la porter à 70 ans. Est-ce sain et durable ? La réponse est dans la question.

Le débat politique et social s’est hystérisé en France depuis dix ans sur la question de la retraite et des inégalités sociales alors même que l’âge de départ à la retraite est un des plus bas du monde, même s’il restait fixé à 64 ans, et que les inégalités de revenus après redistribution sont parmi les plus faibles au monde. Quel est le sujet de politique économique massif qui n’est pas traité dans notre pays, sauf à la marge ?

La croissance annuelle moyenne de notre économie depuis vingt ans est à peine supérieure à 1% quand elle devrait dépasser 2% l’an pour générer les recettes nécessaires pour financer une protection sociale de pays riche. Notre économie stagnante nous transforme en pays pauvre au sein de l’Union européenne. Or les débats politiques ne portent qu’occasionnellement sur la relance de la production, notamment industrielle. De plus, notre démographie est chancelante car les familles ont intégré cet appauvrissement relatif dans leurs perspectives sociales de long terme.

Même si l’industrie du futur se développe dans des usines robotisées, numérisées et électrifiées, et que les travaux dans le bâtiment – travaux publics, l’agroalimentaire et les activités répétitives dans le froid et le bruit ont fait l’objet d’aménagements de confort significatifs, on peut considérer que 11% à 14% de la population active travaillent dans des conditions « pénibles ».

Les travaux du Conseil d’Orientation des Retraites et de l’INSEE conduisent à considérer que la disparition du déficit des régimes de retraite exigerait de porter la durée de cotisation à 44 ans et l’âge de départ à la retraite à 65 ans d’ici 2032 pour régler le problème jusqu’en 2060. Ceci permettrait d’augmenter le taux d’emploi de la population active et de contribuer à la hausse de la croissance économique. Comment concilier ces objectifs ?

L’abandon de l’âge de départ de 64 ans est évidemment une erreur politique et sociale d’autant plus grave qu’elle ne traite pas les deux sujets majeurs de la pénibilité du travail et de la maternité.

Il faut maintenir l’objectif à terme d’un âge de départ à 64 ans avec une durée de cotisation de 44 ans, accompagné d’une grille de réduction de l’âge et de la durée allant jusqu’à 2 années pour pénibilité en fonction de critères objectifs et de 2 ans pour maternité – six mois par enfant avec un plafond de 2 ans. Les deux aménagements seraient plafonnés à 3 ans en cas de cumul aux extrêmes (emploi le plus pénible et plus de 4 enfants). On peut anticiper que les 11% à 14% d’emplois pénibles donneraient un bonus moyen de 12 à 15 mois et que les mères de deux enfants auraient un bonus d’un an. Le bonus global pour les mères en emploi semi-pénible serait de 18 mois, à la fois sur l’âge et la durée, soit 62 ans et demi et 42 ans et demi.

Il faut également favoriser les accords de filière permettant aux entreprises de secteurs à l’emploi difficile de réduire l’âge et la durée à leurs frais. Relancer la production et traiter la pénibilité exige des doigts de fée réformistes plutôt qu’un retour en arrière brutal et destructeur de prospérité collective.

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