La COP29 de Bakou va déboucher sur peu d’avancées concrètes. Christian de Boissieu estime pourtant urgent de développer des outils internationaux pour contourner la difficile émergence des marchés financiers au Sud.
Sans surprise, la COP29 de Bakou va déboucher sur de bonnes intentions et peu d’avancées concrètes. Certes, le contexte est compliqué, entre la faiblesse structurelle du G20, la probable nouvelle sortie de Donald Trump de l’Accord de Paris et la contestation croissante du Nord par les pays du « Sud global ».
Il était temps de consacrer une COP au financement de la transition énergétique et écologique (TEE), spécialement aux transferts des pays avancés vers les pays du Sud. Dès 2009, les premiers s’étaient engagés à verser 100 milliards de dollars par an vers les seconds. Un chiffre atteint seulement à partir de 2022. On sait aujourd’hui qu’il faut aller beaucoup plus loin, quantitativement et qualitativement. L’Afrique n’est responsable que de 4 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre, mais elle est financièrement sollicitée bien au-delà de ce chiffre.
Des contraintes fortes
Des contraintes fortes pèsent sur les solutions. D’abord, partout, la pression est énorme sur les finances publiques, vu la liste de toutes les dépenses à couvrir. Si nombre de pays avancés, dont la France, sont surendettés, c’est encore plus vrai pour beaucoup de pays du Sud.
En second lieu, les investissements de la TEE sont par nature à long terme, à rentabilité différée et souvent fort aléatoires. Ils exigent des financements longs et risqués, alors que le monde et même le Sud regorgent d’épargne, mais une épargne liquide ou à court terme. Les banques ne veulent pas ou ne peuvent pas assumer de tels risques aussi pour des raisons réglementaires. Quant aux banques centrales, elles sont en train de « verdir » leurs interventions, mais ce serait une folie de compter sur une création monétaire débridée pour régler les difficultés de financement.
Inventaire à la Prévert
La COP29 a concocté un inventaire à la Prévert des taxes susceptibles d’atténuer le changement climatique et d’aider à financer les adaptations requises : sur l’aérien, le maritime, les énergies fossiles, les plastiques, les cryptoactifs, les riches… N’en jetez plus ! La fiscalité doit jouer, sans conteste, un rôle avec la taxe carbone et quelques autres dispositifs. Il faut privilégier les taxes susceptibles de rassembler le plus grand nombre de pays. Pas facile quand on constate l’insignifiance de la gouvernance mondiale actuelle , et qu’on a en tête l’échec du projet de taxe sur les transactions financières dans l’UE…
Une façon de favoriser les financements mixtes (public/privé) serait de déployer des dispositifs de garantie accordés par les Etats et les organismes multilatéraux (Banque mondiale, BEI pour l’Europe, BAD et BOAD pour l’Afrique…) sur des financements privés. Seuls certains emprunteurs seront défaillants : la garantie économise de l’argent public en comparaison de dépenses budgétaires directes. On l’a vu lors de la gestion de la crise bancaire en Europe en 2008, ou avec les PGE en France.
Banques multilatérales
Puisque les banques multilatérales de financement disposent d’une bonne notation, il leur faut emprunter encore plus sur les marchés internationaux et financer, sous condition, nombre de projets de la TEE au Sud. En apportant au cas par cas leur garantie, comme les Etats pour d’autres projets. En souscrivant à des obligations vraiment « vertes ». Une façon de contourner la difficile émergence des marchés financiers au Sud. Dans d’autres configurations du couple rendement-risque, des fonds d’investissement pourraient intervenir sans garantie publique.