Dans quel état d’esprit sont les marchés financiers à deux semaines de l’élection présidentielle aux Etats-Unis ? Quelles réactions attendre ? Bertrand Jacquillat explique pourquoi les investisseurs vont rester sereins dans la dernière ligne droite.
La prochaine élection présidentielle américaine constitue un enjeu majeur pour un nombre considérable d’individus et d’organisations. Pour se faire une idée du résultat quant à l’identité du quarante-cinquième président des Etats-Unis, il y a les sondages qui donnent une avance de près de dix points à Joe Biden, mais surtout le marché organisé des prévisions de l’Iowa (Iowa Electronic Market, IEM). Celui-ci offre deux types de contrats : l’un portant sur le pourcentage de suffrages obtenus et l’autre sur l’identité du vainqueur à l’issue du scrutin, dont les résultats peuvent diverger du fait de la spécificité du système électoral américain.
L’IEM ne s’est jamais trompé depuis sa création en 1988 sauf pour Hillary Clinton que l’IEM donnait vainqueur sur les deux contrats, et qui avait perdu l’élection même si elle l’avait largement emporté au pourcentage des suffrages obtenus. L’IEM a mis en place dès le 7 février 2019 ses contrats de futures sur les résultats de la prochaine élection présidentielle. Il attribuait à l’époque 65% de chances au candidat démocrate de l’emporter. Elles sont aujourd’hui de plus de 80%.
Il y a quelques semaines les marchés exprimaient deux craintes. La première était celle d’un putsch démocratique, que Trump s’accroche au pouvoir et n’accepte pas de reconnaître le résultat de l’élection si celui-ci devait lui être défavorable. L’autre crainte était que la victoire du candidat démocrate entraînerait un surcroît d’impôts et taxes, de régulation, tous facteurs défavorables aux actions. Mais depuis le débat présidentiel du 29 septembre, le vent a tourné et ces craintes se sont estompées.
Les différences qui ressortent des sondages entre les deux candidats sont telles qu’elles rendraient quasiment impossible la contestation des résultats par Trump, si celles-ci se confirmaient dans les urnes. Et les investisseurs sont persuadés que la rhétorique gauchiste du candidat démocrate quant aux impôts et aux régulations ne se traduira que de façon très édulcorée dans les décisions du président démocrate.
D’ailleurs, sur le long terme un président démocrate est plus favorable à la bourse qu’un président républicain. Depuis l’élection du démocrate Franklin Pearce en 1853, les marchés d’actions américains ont mieux performé avec un démocrate à la Maison Blanche, 5,2% l’an contre 3,1% pour un président américain. Plus près de nous, la performance boursière de Wall Street a été de 119% sous la double présidence Reagan, et de 241% sous la double présidence Clinton. Elle a été de 32% sous la double présidence Bush, suivie de 125% sous la double présidence Obama. A ce jour, elle a été de 52% sous la présidence Trump.
Il convient aussi de mentionner la malédiction du second mandat. Des neuf présidents américains élus à deux élections consécutives, huit d’entre eux ont connu des performances boursières au cours de leur second mandat inférieures à celles du premier : 28% contre 83%. Aussi, en général les performances du marché sont supérieures à la suite de la défaite d’un président sortant. Tous ces facteurs expliquent la sérénité des investisseurs quant à l’issue des élections présidentielles américaines dans la dernière ligne droite (2,5% de hausse des actions depuis un mois). D’autant que le personnage le plus important de la politique économique et monétaire américaine, le président de la Réserve fédérale (FED) Jay Powell, restera en place quoi qu’il arrive.