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Le grand choc du vieillissement

Nos politiques s’écharpent sur un déficit budgétaire. Sont-ils conscients des bouleversements économiques qui arrivent avec l’effondrement démographique ? Jean-Hervé Lorenzi dévoile les estimations de la chaire « Transitions Démographiques, Transitions Economiques ».

Nous avons toujours eu en France la réputation de prévoir et planifier l’avenir. Tout cela permettait à nos politiques non pas de se soucier du très long terme, mais au moins des deux ou trois prochaines années. Malheureusement, nous avons atteint le niveau le plus incroyable de notre dérive politique. Le budget va vraisemblablement protéger les retraités et sacrifier la jeunesse.

Privilégier les retraités est une absolue priorité pour les petites retraites, mais sûrement pas pour celles qui sont confortables. Première erreur. De plus, même si le formidable effort d’apprentissage n’était pas parfait, quelle erreur de faire passer le rabot budgétaire sur cette politique.

Un aveuglement politique

Ceci signifie que nos politiques n’ont absolument pas pris en compte les impacts, très difficiles du vieillissement. Il y en a trois évidents. Le premier c’est le coût que cela représente tant sur le problème de la santé que sur celle des retraites. Ensuite, il est clair que les innovations, au cœur de la croissance, se font principalement parle talent de jeunes générations.

Enfin, et c’est le plus important, chacun sait qu’il y a une corrélation absolue entre l’âge de l’épargnant et son goût du risque. Au moment même où nous devons investir massivement dans la lutte contre le réchauffement climatique, l’intelligence artificielle, les structures d’accueil pour les personnes dépendantes, l’épargne va évidemment se réfugier dans des investissements qui ne comportent aucun risque. Et cette faiblesse de l’épargne privée, utile au système productif, ne risque pas d’être compensé par l’investissement public, dette oblige !

Mais pour tous ces maux il nous faut être beaucoup plus précis quantitativement. Des travaux ont été réalisés pour 2030, c’est-à-dire demain. La chaire « Transitions démographiques, transitions économiques » a modélisé cette société du vieillissement et les chiffres obtenus sont accablants. En 2030, à connaissance scientifique en matière de santé actuelle et à dispositif de retraite 2023, le surcoût du vieillissement serait de 34 milliards d’euros annuels.

Le surcoût de la dépendance

Quand on voit les énormes difficultés que nous connaissons à établir un budget compatible avec un certain équilibre financier, on ne peut souhaiter qu’une seule chose, que nos politiques soient conscients du choc incroyable que nous commençons à connaître.

Pour être plus précis, la chaire estime dans ses modèles qu’entre 2025 et 2030 il y aura 300.000 personnes dépendantes supplémentaires. La part des profils très dépendants, GIR 1 et 2, devrait donc bondir de 55 % à 62 % des résidents en EHPAD en 2030.

Si on y ajoute les problèmes de recrutement et d’emploi, pour lesquels on ne peut qu’améliorer les conditions d’aujourd’hui, la dépendance engendre un surcoût de 22 milliards d’euros en 2030. Quant aux retraites, on est bien évidemment en pleine incertitude, mais si l’on se base sur la réforme de 2023, les modèles indiquent que le besoin de financement supplémentaire annuel serait de 12 milliards.

Pour tous ces problèmes, il y a des solutions, notamment l’augmentation du taux d’activité de femmes et d’hommes de plus de 60 ans, mais il n’en demeure pas mois que les contraintes induites par ce vieillissement sont aujourd’hui sans solutions.

Il nous faut donc remettre à plat, de manière juste et efficace tous nos modes de fonctionnement en matière de travail, de formation et de répartition. Un seul mot s’impose pour sortir de cette énorme difficulté, la croissance.

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