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Fusion PSA-FCA : vers une société européenne ?

Le projet de fusion PSA-FCA, car à ce stade il s’agit encore d’un projet, ouvre des perspectives intéressantes.

Cette fusion est révélatrice de l’état du secteur automobile au plan mondial. La surcapacité sur certains segments conduit chacun des gros opérateurs à accroître sa part de marché pour compenser l’érosion des marges unitaires. Avec, à la clef, des gagnants et des perdants. Après l’échec du rapprochement Renault-FCA, PSA et le groupe FIAT Chrysler ont eu raison de prendre les devants, d’être proactifs plutôt que réactifs. Même si, du point de vue de la gouvernance du nouvel ensemble, il faut être réaliste : les fusions à 50/50 démarrent comme telles, mais souvent l’un des mariés finit par prendre le pas sur l’autre…

En matière industrielle, le projet fait sens : complémentarité des marques, des cibles géographiques communes en particulier l’Asie, intégration des stratégies d’innovation pour développer la voiture connectée, renforcer le pôle électrique… La taille est un atout pour rester sur la « frontière technologique » en matière d’IA.

Mettre en avant les synergies entre les deux groupes, c’est aussi chercher des économies d’échelle. Difficile de zapper les conséquences quantitatives et qualitatives pour l’emploi. Par souci de transparence vis-à-vis du personnel, des syndicats et des pouvoirs publics, il faudrait avoir assez vite une estimation des conséquences prévisibles, à terme, de la fusion pour l’emploi dans les deux groupes en France, en Italie mais aussi ailleurs. Cela permettrait de planifier dans le temps les conséquences sociales du projet et de renforcer dès maintenant les investissements en formation continue requis par les reconversions.

Le choix par la nouvelle entité du statut de société européenne (SE) serait un signal fort de l’ambition européenne du projet. Pour l’image, il n’y aurait que des avantages. Le statut de SE, organisé depuis 2001 mais en fait développé depuis 2004, a connu depuis des fortunes diverses. Il concerne aujourd’hui environ 3000 entreprises dans l’UE, allant de la PME jusqu’à des grandes sociétés comme Airbus, Allianz, Scor, LVMH, Atos… Pour des raisons différentes, les SE sont nombreuses en Allemagne, en République tchèque, au Luxembourg… Pour le nouveau groupe PSA/FCA, l’analyse coûts-avantages du statut de SE doit être mené sans précipitation mais dans la transparence. Outre l’effet positif sur l’image, la SE laisse ouvert le choix de la structure de gouvernance, moniste ou dualiste (directoire et conseil de surveillance) ; elle facilite une stratégie à l’échelle de l’UE ; elle permet, sous certaines conditions, de mieux associer le personnel et ses représentants à la gestion de l’entreprise ; elle rend plus aisé le transfert du siège social d’un pays-membre à l’autre.

A propos justement du siège social, l’annonce du choix d’Amsterdam a paru un peu précipité et générateur d’ambiguïtés. La recherche légitime d’un siège « neutre » aurait pu aussi bien déboucher, par exemple, sur Bruxelles, et elle aurait ainsi évité de prendre le risque de « polluer » la logique industrielle du projet par des considérations fiscales. C’est un fait que la fiscalité néerlandaise sur les sociétés est encore attractive, même si elle l’est beaucoup moins que l’Irlande ou les pays baltes. En pratique, les sièges sont surtout attirés aux Pays-Bas par la densité des conventions bilatérales qui viennent limiter une double imposition.

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