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Comment financer le budget de la défense ?

Pour financer l’effort de défense, le débat est vif entre hausse des impôts, baisse des dépenses sociales ou augmentation des heures travaillées. Xavier Ragot passe les options en revue.

Le budget de la défense est en hausse et devrait atteindre 2 % du PIB dans le budget 2025, avec une cible de 3 %. L’objectif n’est pas ici de discuter cette cible, mais de contribuer, plus modestement, à la question de son financement.

Le débat est vif, avec des positions politiques légitimes : hausse des impôts, baisse des dépenses sociales ou hausse de la croissance par l’augmentation des heures travaillées ?

Les Etats-Unis ont tout testé

Qu’ont fait les autres pays ? Les Etats-Unis, étudiés par Claudia Goldin, ont connu une grande diversité des modes de financement des hausses de dépenses militaires : un accroissement de la dette publique, comme lors de la Seconde Guerre mondiale ; des hausses d’impôts, comme pour la guerre de Corée en 1950 ; ou encore la taxe inflationniste, dans le cas de la guerre du Vietnam.

Au-delà du seul cas américain, l’étude de cent cinquante ans de budgets publics dans de nombreux pays montre qu’à la fois l’endettement public et la hausse de la fiscalité ont été utilisés. Par ailleurs, les hausses des dépenses sociales ont été, en moyenne, seulement un peu moindres que pendant les autres périodes.

« Les exemples historiques montrent que les transformations substantielles des dépenses demandent du temps. »

Xavier Ragot

Que dit maintenant la théorie économique ? Une hausse temporaire des dépenses militaires doit plutôt être financée par la dette publique, mais une dépense de long terme doit être financée par une hausse des impôts ou une croissance moindre des autres dépenses publiques. Pourquoi ne pas toujours utiliser la dette publique, ce qui permettrait de ne pas perturber le système fiscal ?

Celle-ci ne fait que retarder le financement, car il faudra une hausse des impôts pour stabiliser la dette publique. Dès lors, les hausses d’impôts futures seront doubles : pour le budget militaire et pour stabiliser la dette publique. Des arguments peuvent nuancer ce discours, comme des effets d’entraînement à court terme sur l’activité ou des retombées civiles des technologies militaires, mais ces effets sont transitoires ou empiriquement faibles.

Effort inédit

La France connaît un déficit public important, attendu en 2025 à 5,4 % du PIB, avec une dette publique déjà élevée. L’effort à venir pour stabiliser la dette publique est inédit dans l’histoire des finances publiques françaises, auquel s’ajoute l’urgence des dépenses militaires.

Les exemples historiques montrent que les transformations substantielles des dépenses demandent du temps, à partir d’un diagnostic général, ce qui semble difficile dans une Assemblée nationale divisée. Quels outils restent-ils ?

Une première option est l’augmentation des heures travaillées. Cet objectif demande aussi du temps, car il faut repenser la formation, notamment la formation professionnelle, et l’emploi des seniors. S’il faut ouvrir ces chantiers dès maintenant, le temps de la réforme ne correspond pas à l’urgence budgétaire.

Une seconde option est la modification du système socio-fiscal, par une hausse des impôts ou des baisses de dépenses déjà identifiées, afin de dégager des ressources nouvelles et transitoires sans modification majeure des effets distributifs : c’est une conception churchillienne des efforts partagés.

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