Le fléau du coronavirus nécessite de prendre un peu de recul car celui-ci, au-delà de la crise sanitaire, pose des problèmes d’ordre géostratégique selon Olivier Pastré.
Avec maintenant presque 10 ans de recul par rapport au « Printemps arabe », quel bilan peut-on tirer ? Contrairement à de nombreux esprits chagrins qui soulignent les signes – évidents – d’un échec d’ensemble, il existe un certain nombre de signaux positifs qui permettent de voir le « verre à moitié plein » et donc de rester optimiste.
Ce qui est vrai au niveau régional l’est aussi au niveau de nombreux pays-clés de la région. L’Algérie est dans une situation économique dramatique du fait de la chute brutale du prix du pétrole affecte gravement les finances publiques et rend impossible toute politique de relance. Pour le Liban, la situation est encore plus simple puisque le Liban est en défaut de paiement. Quant à la Tunisie, pays qui ne dispose pas de matières premières et qui est à la frontière de la Libye et du Sahel, elle ne dispose pas d’un gouvernement en état de prendre les mesures économiques indispensables à la relance de la croissance.
Ce diagnostic ne pousse guère à l’optimisme. Et pourtant. La résilience libanaise démontrée depuis plusieurs décennies, la vigueur et la responsabilité de la jeunesse algérienne, le dynamisme du tissu des PME tunisiennes sont autant d’éléments qui interdisent le fatalisme. Il ne faudrait pas grand-chose pour passer d’un cercle vicieux à un cercle vertueux dans la plupart des pays de cette région.
L’Europe peut-elle se désintéresser de ce problème qui est à ses portes et se contenter d’une réaction protectionniste ? Bien sûr que non, et ce pour une raison très simple : selon le côté où va « tomber la pièce » (intégrisme ou démocratisation), l’Europe sera la première victime d’une aggravation de la crise au Sud de la Méditerranée. Il faut certes se concentrer sur la gestion au quotidien de l’épidémie du coronavirus en France.
Mais il faut aussi, pour la sortie d’épidémie, redéfinir une politique méditerranéenne, peut-être moins ambitieuse et plus pragmatique, pour, dans la version la plus égoïste de ce projet, protéger l’Europe des conséquences pour elle, d’une aggravation de la crise chez nos voisins du Sud. Le diagnostic est sans appel. Il en va de l’avenir de nos enfants.