Cet article est extrait du troisième numéro de la revue Mermoz, « Innover sans fin ? ».
Changer nos habitudes ou nos convictions peut être un sacré défi, d’autant plus quand il est question d’innovation et de la manière dont elle irrigue nos vies. Pour tous ces changements, la peur ou la crainte peut refreiner notre capacité à nous adapter. Pourtant, le sentimentx explique-t-il tout ? Pour comprendre les mécanismes à l’œuvre, nous vous proposons d’identifier d’abord les ressorts psychologiques et philosophiques de nos peurs, et ensuite comment cela se traduit pour les innovations en matière de santé.
Ce que notre rapport à l’innovation dit de nous
Lorsqu’elles sortent sur un marché, les innovations ont toujours leurs détracteurs. Quels sont les ressorts psychologiques et sociaux derrière cette réaction ? Quels systèmes de valeurs structurent notre rapport à l’innovation et sur quels leviers agir pour mieux l’appréhender ?
La peur de l’innovation est-elle inhérente à l’espèce humaine ?
Xavier Pavie : Il est plutôt naturel d’avoir une part de détracteurs à l’émergence d’une nouveauté qui potentiellement deviendra innovation. Il faut rappeler que l’innovation vient du latin innovare, composé des mots, in, à l’intérieur, et novare, le changement. Ce qui veut dire que l’innovation, c’est le « changement à l’intérieur », de soi, d’un organisme ou d’une organisation. Or, nous sommes naturellement craintifs vis-à-vis du changement compte tenu des incertitudes qu’il peut amener. Ainsi d’un côté nous avons du mal à gérer l’incertain qui est pourtant est une condition intrinsèque à l’innovation ; d’un autre côté l’innovation a pour dessein la survie. Ce qui amène à un paradoxe : nous devons innover pour survivre, et pourtant nous craignons le changement qui nous ferait survivre. En conséquence, nous chérissons le changement mais plutôt pour les autres, c’est-à-dire celui pour lequel nous avons un intérêt, sans soi-même avoir besoin de nous changer. Pour le dire d’une autre manière la nécessité ontologique de l’innovation se replie d’une certaine manière sur elle-même, ce qui cause un paradoxe pour ne pas dire une forme de schizophrénie ce qui par exemple peut se lire en politique, lors de choix électoraux.
Comment les humains arrivent-ils à gérer ce paradoxe ?
X.P. : Face à une innovation, les comportements d’adaptation vont être différents en fonction des types d’individus. Pour une personne âgée, par exemple, la tablette est bien plus pratique que l’ordinateur. En revanche, lorsque la même tablette arrive dans les salles de cours, vous allez faire face aux réticences des enseignants ou parents. Ce qui veut dire que dans l’innovation, il y a toujours une partie de pédagogie, toujours besoin d’expliquer en quoi cette innovation pourrait avoir un sens tout en prenant soin qu’elle en reste le maitre et non son esclave. L’innovation n’est jamais ni bien ni mal, ni utile ou inutile, elle est. En conséquence il est déterminant d’élaborer une herméneutique de l’innovation, considérer autant ses ressorts que ses attributs. Si ce travail n’est pas fait nous rejetons l’innovation ou nous en devenons dépendants.
Nous sommes désormais dans une société où l’innovation est plus importante que l’homme lui-même ce qui, évidemment, peut faire peur. L’innovation est au centre et les hommes courent après elle : ils se ruent derrière la nouvelle version d’une intelligence générative, après un nouveau smartphone, après une nouvelle voiture électrique, etc. L’homme est plongé dans un ensemble d’innovations, il attrape quelques bouées pour survivre mais globalement il ne sait plus très bien comment gérer cette inondation.
L’innovation devient, en quelque sorte, la valeur centrale prônée par la société, au détriment de l’homme ?
X.P. : Absolument. Ivan Illich dans les années 60-70, l’avait déjà souligné, comme d’ailleurs Jacques Ellul ou encore René Guénon. Illich cherchait à repenser ce que pourrait être une société conviviale et pourquoi elle risquait de ne plus l’être notamment à cause de la technique. Par exemple dans les années 50-60, le téléphone filaire pouvait être qualifié « d’objet convivial » parce que ses fonctionnalités permettaient d’appeler quelqu’un qu’on ne voyait pas souvent ou qui était à distance pour prendre de ses nouvelles. Mais très vite, et encore plus aujourd’hui, il est devenu un objet anti-convivial : nous nous servons du téléphone pour appeler notre voisin de bureau au lieu d’aller le voir, nous remplaçons un déplacement par un appel, etc. Le téléphone devient l’objet central grâce auquel on est connecté du matin au soir pour prendre des nouvelles, lire le journal, travailler, partager des informations mais sans avoir la moindre interaction. L’appareil téléphonique par essence convivial, par nécessité ramifié, finalement nous subjectivise tout en nous cloitrant, même au sein d’une foule.
Est-ce que cela ne reflète pas aussi un changement dans la conception du progrès ?
X.P. : À la différence de l’innovation, le progrès est impartial. Quand on recherche le progrès, il n’y a pas forcément la notion schumpétérienne de profit, de rentabilité. Le progrès, qui vient du latin progressus, signifie la marche en avant. Des progrès dans la science ne sont pas forcément liés à des innovations, mais des innovations peuvent s’y greffer. La question sous-jacente est de s’interroger si nous avons encore aujourd’hui du progrès ou seulement de l’innovation. L’exemple de l’intelligence artificielle dans sa version moderne est clair. ChatGPT, c’est OpenAI, c’est une entreprise, celle-ci est moins portée par le progrès que l’innovation ! Nous n’avons pas dans cet exemple une volonté de progrès, comme nous avons pu l’avoir avec Arpanet, l’ancêtre d’Internet fruit d’informaticiens et chercheurs financés par l’armée, qui n’allaient pas chercher le profit en tant que tel, mais plutôt les réseaux de communication et d’interaction. L’intelligence artificielle n’a pas été développée dans un but de progrès de la connaissance ou de l’humanité. Ce n’est pas le CNRS, par exemple, qui a développé l’intelligence artificielle dans un but d’amélioration de l’éducation ou de la santé. Nous pouvons légitimement nous demander si le progrès n’est pas dans une phase descendante par rapport à l’innovation toute hégémonique. L’égoïsme contemporain semble avoir pris le dessus sur l’individualisme dix-neuvièmiste d’Emerson.
On a l’impression que la peur de l’innovation est mal considérée aujourd’hui, comme un frein. Mais ne pourrait-elle pas être aussi vue de manière positive, peut-être comme un garde-fou, parfois, pour nous prémunir contre certains excès de l’innovation ?
X.P. : La notion de peur est naturelle et peut permettre de se protéger en s’écartant, en prenant de la distance. Mais elle peut aussi être irrationnelle car liée à l’incompréhension, l’absence de connaissance. Lorsque l’on ne comprend pas quelque chose on prend peur, on se protège, on s’écarte. Ce n’est pas moins vrai pour les arachnophobes ou aérophobes, face à ses peurs on prend la fuite. Si d’une certaine manière l’innovation est plus effrayante aujourd’hui c’est pour deux éléments majeurs qui auparavant pouvaient nous protéger : la religion et la faible avancée technique. En effet pendant longtemps, la religion, omniprésente dans les sociétés occidentales, nous a empêché d’innover, par exemple en sanctifiant le vivant, il était interdit de manipuler, de modifier tout ce qui avait trait à l’espèce humaine. D’autre part les connaissances techniques ne permettaient pas de réaliser ce qui était pourtant désiré. Mais quand l’importance de la religion diminue dans la société alors que, d’un autre côté, les possibilités augmentent avec la technique alors tout explose, tout se libère, comme avec par exemple le séquençage de l’ADN généralisé, les manipulations génétiques ou encore le transhumanisme. Finalement Elon Musk n’est qu’un Prométhée moderne !
Je ne dirais donc pas que la peur protège, elle a plutôt tendance à rejeter, à faire fuir ce qui n’est qu’une question de temporalité ou de spatialité. Ce qui à mon sens protège c’est la responsabilité. Que l’innovateur ne s’interroge plus désormais en fonction de ce qui est interdit et de ce qui est possible techniquement, mais en fonction de ce qu’il pense être bon et juste. Que l’innovateur s’engage dans ses actions avec une systématisation de la problématique philosophique : que dois-je faire ? et son corollaire : pourquoi je fais ce que je fais ?
Quel rôle doit jouer la puissance publique par rapport à tout cela ?
X.P. : L’innovation vient toujours avant la loi. À titre d’exemple on peut reprendre le cas de la gestation pour autrui ou procréation médicalement assistée par exemple pour les couples homosexuels. La loi ne le permettant pas en France les femmes rejoignaient souvent la Grèce, la Belgique ou le Portugal où ces pratiques étaient autorisées et revenaient en France avec l’enfant désormais à reconnaître. L’innovation était donc présente, mais sans loi pour l’encadrer. Ce n’est pas moins vrai pour les débuts d’Uber ou Airbnb. Aujourd’hui il ne fait pas de sens par exemple d’interdire ou de limiter d’une manière ou d’une autre le développement des intelligences artificielles génératives en France, elles existent, resteront présentent et utilisées que celles-ci soient développées en Europe ou non. En revanche, la puissance publique peut poser des conditions ou recommandations d’usage. Par exemple, on pourrait rendre obligatoire un certain nombre d’heures de cours ou un diplôme de philosophie de la responsabilité, reconnu par l’État, pour pouvoir développer une entreprise utilisant l’intelligence artificielle.
Et au niveau du grand public, comment améliorer l’acceptabilité de l’innovation ?
X.P. : L’acceptabilité est liée à la compréhension, or les objets et les services innovants sont de plus en plus complexes, et font qu’aujourd’hui seul un ingénieur est véritablement capable de comprendre les nouveaux objets mis sur le marché. Par exemple qui connaît l’émission de CO2 d’une requête sur Gemini par rapport à une requête sur Google ? Qui est en mesure de connaître les polluants utilisés pour l’exploitation des terres rares destinés à fabriquer des écrans tactiles ? Qui sait comment peut s’organiser le recyclage des mécanismes complexes d’une batterie électrique ? Ainsi les innovations ne peuvent venir sans une culture scientifique minimale et il y a certainement une obligation morale de la part des innovateurs à partager, informer, développer le savoir technique auprès des citoyens. C’est à ce prix que l’innovation peut être mieux acceptée.
Observe-t-on des spécificités françaises en matière
de réception de l’innovation ?
X.P. : Oui, il y a une résistance naturelle plus forte que dans la plupart des pays du monde. Quand on demande à des Français si la robotisation et l’intelligence artificielle sont une menace, ils répondent très majoritairement oui. Si vous posez la même question à Singapour, la réponse est très majoritairement non. Ça n’est pas nouveau. En novembre 1788, à Falaise dans le Calvados, deux mille ouvriers avaient détruit une machine à filer le coton à coups de bâton. On peut citer aussi le célèbre mouvement des luddites, cette fois en Angleterre qui cassaient les machines à tisser au XIXe siècle. Plus récemment, on l’a vécu avec Uber. Ça a été d’une violence terrible ! Des chauffeurs de taxi avaient bloqué la Porte Maillot et physiquement lançaient des pneus et des cailloux sur les voitures type VTC qui passaient sur le périphérique. La notion de destruction, par rejet et par peur, est importante.
Les ressorts en sont très profonds, les Français ont naturellement une volonté de garder leur liberté, leur indépendance. Cette dimension-là est plus forte qu’ailleurs, c’est même le premier mot de notre devise. Si certaines caméras de vidéosurveillance sont acceptées dans certaines villes, initialement à Levallois-Perret ou Nice, des villes plutôt conservatrices, pour le reste de la France, notamment pour les Jeux Olympiques, c’est quelque chose qui a beaucoup crispé.
Innovation & santé : dépasser les peurs
S’il existe un domaine dans lequel les innovations peuvent faire peur – et susciter des fantasmes –, c’est bien celui de la santé. Pour tenter d’en comprendre les ressorts, nous avons proposé à Yasmine Belkaid de partager l’expérience de l’Institut Pasteur en matière de vaccination. L’occasion, également, d’ouvrir quelques perspectives sur les prochaines innovations de santé à venir.
Comment le public réagit-il généralement aux innovations en matière de santé ? On pense à l’introduction sur le marché des vaccins Covid, quels types de réactions avez-vous enregistrées ?
Yasmine Belkaid : Contrairement à une idée reçue, le public non seulement accepte les innovations en matière de santé, mais il les attend, les espère et même les suscite par ses dons. Les innovations, nombreuses, résultent du travail de dizaines de milliers de chercheurs partout dans le monde, dont les équipes de l’Institut Pasteur, dans une dynamique itérative et collective qui ne connaît pas d’équivalent dans les autres domaines. Le public, qui en est le premier bénéficiaire, le sait et accorde à cela de la valeur. Les scientifiques et les chercheurs jouissent d’une image extrêmement positive et inspirent globalement une très large confiance dans l’opinion.
Cependant, il faut reconnaître que ce rapport du public à la science et à l’innovation en santé est ambivalent. Comme le soulignait l’enquête Les Français et la science du sociologue Michel Dubois (CNRS), les Français ne considèrent plus que la science est vectrice de progrès social et ils sont plus de 50 % à estimer qu’elle apporte autant de bien que de mal (un changement majeur par rapport aux années 1970). Les raisons de ce regard critique, voire de cette défiance, sont multiples, mais elles touchent souvent à l’innovation scientifique, dont la responsabilité est pointée dans les crises ou les difficultés de nos sociétés (des crises sanitaires les plus récentes à l’enjeu du réchauffement climatique, enfant du progrès industriel).
Y a-t-il des craintes propres aux innovations en matière de santé ? Quels sont les principaux freins auxquels vous avez été confrontée lors de l’introduction de nouveaux vaccins ?
Y.B. : L’innovation en santé, en particulier dans le domaine vaccinal, pose toujours question et, contrairement
à certains peut-être, je pense que c’est légitime dès lors qu’on touche au corps et à ce bien intime et individuel qu’est la santé. Combien de personnes savent réellement comment est pensée, conçue et produite une innovation de santé, un vaccin ou un médicament ? Connaissez-vous précisément toutes les étapes de contrôle – et elles sont très nombreuses – qui sont requises dans le cycle de développement d’un vaccin ? Nous devons répondre
à ces questions.
La défiance vis-à-vis de l’innovation en santé et du progrès médical, notamment sa traduction à travers les mouvements antivax, est la résultante de nombreux facteurs, qui trouvent parfois leurs fondements très loin dans notre histoire sociale et politique, au sein du lien compliqué entre les sachants et les dirigeants, d’un côté, et le peuple, de l’autre. Ce que Philippe Sansonetti analyse précisément dans son ouvrage Microbes sans frontières.
Cette défiance prospère également dans le contexte actuel d’inflation informationnelle, d’outrance sensationnaliste et de rétrécissement du temps d’attention, qui compliquent la prise de recul et l’exercice d’analyse. La crise Covid a été, de ce point de vue, un accélérateur et un amplificateur de tendances, et la responsabilité des scientifiques eux-mêmes n’est pas nulle dans cette affaire. Cela doit nous interroger et nous devons trouver des réponses pour faire mieux lors des prochaines crises et regagner la confiance du public, car la science ne peut avancer sans application et sans avoir toujours comme objectif le progrès humain.
A-t-on observé dans l’histoire de la santé des innovations rejetées à tort, alors qu’elles ne présentaient aucun risque ou un risque minime ?
Y.B. : À leur époque, les premiers vaccins, se laver les mains, ou encore la radiographie ont été d’abord rejetés par leurs contemporains. Les mêmes schémas de rejet se répètent jusqu’à aujourd’hui. Pour l’expliquer, il faut revenir à nos peurs ancestrales de modification des lois de la nature. Par exemple, les interrogations fondamentales et éthiques sont nombreuses en ce qui concerne les innovations en thérapie génique, par exemple. Elles sont bien sûr légitimes, mais elles procèdent souvent de malentendus et d’une connaissance imparfaite des nouvelles technologies. Typiquement, cette crainte de modification des lois de la nature s’est invitée dans le débat sur les vaccins à ARN, alors que ces vaccins n’induisent aucune modification génétique.
Inversement, je pense à l’effervescence autour de la découverte de la radioactivité au début du XXe siècle avec l’apparition de crèmes radioactives, de cures thermales radioactives… sans que les risques soient suffisamment anticipés ni pris en compte. Les innovations doivent être évaluées sérieusement, dans le long terme. C’est ce qui a été fait par exemple avec le développement du vaccin contre le Covid, avec des remontées d’information régulières sur les éventuels effets secondaires, dans un délai record.
Comment l’Institut Pasteur s’y prend-t-il pour améliorer l’acceptabilité des innovations en matière de santé ?
Y.B. : Nous travaillons sur différents axes. Nous communiquons régulièrement auprès du public sur le résultat de nos recherches, afin d’éclairer le parcours de l’innovation en santé sur l’ensemble de la chaîne. Nous l’informons évidemment sur nos projets d’applications à toutes les étapes de leur développement, de leur conception à leur introduction sur le marché. Nous renforçons constamment la pédagogie et nos capacités de vulgarisation, en faisant évoluer nos formats. Nous développons et entretenons les liens avec la société, en commençant par les jeunes, sur ce que sont la science et la recherche afin de les armer dans les débats d’aujourd’hui. C’est en expliquant comment les chercheurs travaillent que l’on pourra renforcer le lien de confiance avec la société. Enfin, nous organisons des sessions de réflexion et de travail collectives sur les sujets particulièrement sensibles et actuels dans l’opinion, comme un colloque sur les infodémies fin 2022 ou encore les travaux de la cellule éthique autour des fakenews pendant la pandémie de Covid-19.
Quels sont les prochaines grandes innovations de santé et comment vous préparez-vous à les rendre acceptées par la population ?
Y.B. : Si on combine les technologies de séquençage rapide à haut débit et l’IA par exemple, nous pourrions avoir des avancées importantes en matière de diagnostic et de prévention. On peut imaginer, à l’avenir, une machine automatisée intégrant ces innovations, qui sera en mesure de détecter une infection ou une pathologie difficile à déterminer aujourd’hui sans un parcours de santé long et complexe. Il va donc falloir expliquer, éduquer, et collaborer en amont avec la société sur ces innovations pour prévenir les craintes légitimes. Ces machines n’ont pas vocation à remplacer le médecin. Les pouvoirs publics doivent anticiper et réfléchir aux normes de préservation des données génétiques personnelles et leur utilisation dans la recherche. Par exemple, nous pourrions trouver de nouveaux biomarqueurs de pathologies, jusqu’ici indécelables, en puisant dans toutes ces données. Quel progrès à venir ! C’est passionnant.
De grands progrès sont à attendre dans le diagnostic des maladies, grâce à des algorithmes qui dépassent les capacités d’observation de l’humain : détecter des anomalies dans des images d’IRM dès les premiers stades de la maladie, identifier dans la voie des modulations liées à des troubles internes, repérer des marqueurs sanguins associés à des troubles neurodégénératifs avant qu’ils n’entraînent un déclin cognitif marqué… Les progrès d’outil de modélisation 3D comme AlphaFold, qui permet de prédire la structure d’une protéine à partir de sa composition chimique, mais également d’estimer comment elle va interagir avec de potentiels médicaments, est un pas en avant majeur dans le développement de nouvelles thérapies. Enfin, la personnalisation des traitements, grâce à une meilleure connaissance des caractéristiques de chaque patient, que ce soit son patrimoine génétique, ses habitudes de vie, etc. permettra de progresser dans des champs qui peinent encore à enregistrer des succès thérapeutiques.
La vaccination a vécu un regain d’intérêt avec la pandémie de Covid-10 et le développement fulgurant des vaccins à ARN. Cela ouvre la voie au développement de vaccins préventifs pour contrer des infections contre lesquelles il n’existe encore aucun vaccin efficace (on pense évidemment au VIH), mais aussi aux vaccins thérapeutiques, notamment contre les cancers, qui permettent de booster la réponse immunitaire pour lutter efficacement contre les tumeurs.
Enfin, la thérapie génique est un champ exploité depuis plusieurs années, pour lequel on commence à observer de premières victoires. C’est le sens de l’essai Audiogene lancé ces derniers mois à l’Institut de l’Audition, centre de l’Institut Pasteur. Il s’agit du premier essai clinique en France visant à tester un médicament de thérapie génique, le SENS-501, développé par la Biotech Sensorion, pour traiter chez des enfants une surdité héréditaire, dite DFNB9, due à des mutations du gène OTOF qui code la protéine appelée otoferline.
Toutes ces innovations ont un objectif : traiter au bon moment (soit souvent au plus tôt, avant que les symptômes ne s’aggravent), la bonne personne avec le bon traitement, qui provoque moins d’effets secondaires. Trop de malades sont dans des impasses thérapeutiques, nous n’en sommes pas à la fin de l’histoire concernant notre lutte ancestrale contre les maladies !